Dossier par Manuel Piolat Soleymat
“Hôtel Dorothy Parker”
Au théâtre des Déchargeurs
Excentrique. Poétique. Caustique. Tragique. "Dorothy Parker" c'est un peu tout ça à la fois. Et ce sont à toutes ces facettes que Rachel Salik souhaite rendre hommage dans un spectacle-kaléidoscope mêlant danse, texte et musique. Geneviève Mnich et Susanne Schmidt se joignent à leur metteuse en scène pour nous présenter cette création.
Jouer : se confronter au monde
"Le théâtre est une école d'humilité", affirme Geneviève Mnich, "de ferveur, d'endurance et d'ouverture d'esprit. Car le travail sur les textes et la représentation théâtrale sont de magnifiques machines à partager la pensée des autres. Je crois d'ailleurs que c'est ce qui m'intéresse le plus dans mon métier. Rien ne m'aurait plus consternée que de m'enfermer dans de petites certitudes". Jean Dasté, Jean-Pierre Vincent, Maurice Bénichou, Peter Brook... Si ces metteurs en scène ont marqué de leur empreinte la carrière de la comédienne, c'est sans doute qu'ils lui ont permis de se "confronter à la complexité du monde sans céder à la simplification" et de "travailler au sein d'un espace de liberté". "Je crois", ajoute-t-elle, "que le jeu est une mise en danger qui ne peut s'éprouver que si l'on travaille dans un contexte où une forme de libre arbitre est laissée au
comédien". Aujourd'hui, c'est sous la direction de Rachel Salik que Geneviève Mnich fait tous les soirs l'expérience de sa liberté d'actrice. Librement inspiré d'extraits de nouvelles et de poèmes écrits par Dorothy Parker, ce montage offre à chaque interprète une partition faite de plusieurs rôles féminins représentatifs de l'univers de l'écrivaine américaine. "C'était
vraiment un être exceptionnel", s'enthousiasme la comédienne, "une rebelle, une femme très
intelligente, qui portait un regard aiguisé comme une lame de couteau sur tout ce qui l'entourait. Mais ce n'était pas seulement ça. Cette intellectuelle qui livrait au monde ses pensées brillantes, qui était la première de tous les combats, était aussi quelqu'un qui consumait littéralement son existence, qui devait faire face à un incroyable mal de vivre".
Mettre en scène :
écrire entre les lignes
Vingt ans après avoir obtenu le grand prix de la révélation du Syndicat de la critique pour sa première mise en scène (Gertrude, morte cet après-midi, d'après Gertrude Stein), Rachel Salik continue, grâce à Hôtel
Dorothy Parker, "d'inventer [son] monde à travers les phrases des autres". Concevant son travail comme une véritable écriture ("visuelle, sonore, poétique..."),
la metteuse en scène "aime mélanger le quotidien et l'imaginaire", composer, "un peu comme un peintre", des "alliances de lumières, d'images, de gestes, d'actions qui [lui] viennent pendant les répétitions", en veillant à ne pas "boucher l'horizon du spectateur par des choses trop réalistes".
"Quand j'ai lu les écrits de Dorothy Parker", explique-t-elle, "je me suis tout de suite dit qu'il y avait là un univers que j'avais envie de rassembler, de théâtraliser : celui de la bourgeoisie new-yorkaise des années 1930, avec la folie, la beauté et le désespoir de cette époque... Et puis je voulais mieux faire connaître cette auteure, rendre justice à son œuvre qui reste finalement assez peu connue en France. J'ai ainsi souhaité donner à ce spectacle tout le dynamisme permettant de faire ressortir l'humour noir et la dérision qui la caractérisaient. Car si ses textes sont habités par une certaine obsession de la mort, ils révèlent également une drôlerie très caustique qui me fait énormément rire !"
3 questions à
Susanne Schmidt
Qui sont les femmes qui composent le paysage d'Hôtel Dorothy Parker ?
Ce sont des créatures à la dérive, brisées par la solitude, qui basculent parfois dans la drogue, dans l'alcool. D'une certaine façon, ces femmes qui souvent possèdent une sensibilité exacerbée sont toutes un peu des doubles de Dorothy Parker.
Comment caractériseriez-vous l'écriture de cette écrivaine ?
C'est une écriture très détaillée, qui me fait un peu penser à un éventail de couleurs. Car on bascule sans arrêt d'un sentiment à un autre, à travers des ruptures mais aussi des glissements. J'aime beaucoup cette façon très précise qu'elle a de nous plonger au sein du monde dans lequel elle a vécu.
Que pouvez-vous dire de l'univers artistique créé par Rachel Salik ?
Il s'agit d'un tissage très poétique entre musique et théâtre, qui me donne d'ailleurs l'occasion de jouer du piano sur scène. Cela me fait très plaisir puisque j'ai grandi dans la musique : ma grand-mère était pianiste et ma mère chanteuse. Rachel Salik offre toujours à ses comédiennes une palette très riche et très variée à interpréter. Elle ne les enferme jamais dans un seul registre. Ça, c'est quelque chose de très important et
finalement d'assez rare...
"Le théâtre est une école d'humilité", affirme Geneviève Mnich, "de ferveur, d'endurance et d'ouverture d'esprit. Car le travail sur les textes et la représentation théâtrale sont de magnifiques machines à partager la pensée des autres. Je crois d'ailleurs que c'est ce qui m'intéresse le plus dans mon métier. Rien ne m'aurait plus consternée que de m'enfermer dans de petites certitudes". Jean Dasté, Jean-Pierre Vincent, Maurice Bénichou, Peter Brook... Si ces metteurs en scène ont marqué de leur empreinte la carrière de la comédienne, c'est sans doute qu'ils lui ont permis de se "confronter à la complexité du monde sans céder à la simplification" et de "travailler au sein d'un espace de liberté". "Je crois", ajoute-t-elle, "que le jeu est une mise en danger qui ne peut s'éprouver que si l'on travaille dans un contexte où une forme de libre arbitre est laissée au
comédien". Aujourd'hui, c'est sous la direction de Rachel Salik que Geneviève Mnich fait tous les soirs l'expérience de sa liberté d'actrice. Librement inspiré d'extraits de nouvelles et de poèmes écrits par Dorothy Parker, ce montage offre à chaque interprète une partition faite de plusieurs rôles féminins représentatifs de l'univers de l'écrivaine américaine. "C'était
vraiment un être exceptionnel", s'enthousiasme la comédienne, "une rebelle, une femme très
intelligente, qui portait un regard aiguisé comme une lame de couteau sur tout ce qui l'entourait. Mais ce n'était pas seulement ça. Cette intellectuelle qui livrait au monde ses pensées brillantes, qui était la première de tous les combats, était aussi quelqu'un qui consumait littéralement son existence, qui devait faire face à un incroyable mal de vivre".
Mettre en scène :
écrire entre les lignes
Vingt ans après avoir obtenu le grand prix de la révélation du Syndicat de la critique pour sa première mise en scène (Gertrude, morte cet après-midi, d'après Gertrude Stein), Rachel Salik continue, grâce à Hôtel
Dorothy Parker, "d'inventer [son] monde à travers les phrases des autres". Concevant son travail comme une véritable écriture ("visuelle, sonore, poétique..."),
la metteuse en scène "aime mélanger le quotidien et l'imaginaire", composer, "un peu comme un peintre", des "alliances de lumières, d'images, de gestes, d'actions qui [lui] viennent pendant les répétitions", en veillant à ne pas "boucher l'horizon du spectateur par des choses trop réalistes".
"Quand j'ai lu les écrits de Dorothy Parker", explique-t-elle, "je me suis tout de suite dit qu'il y avait là un univers que j'avais envie de rassembler, de théâtraliser : celui de la bourgeoisie new-yorkaise des années 1930, avec la folie, la beauté et le désespoir de cette époque... Et puis je voulais mieux faire connaître cette auteure, rendre justice à son œuvre qui reste finalement assez peu connue en France. J'ai ainsi souhaité donner à ce spectacle tout le dynamisme permettant de faire ressortir l'humour noir et la dérision qui la caractérisaient. Car si ses textes sont habités par une certaine obsession de la mort, ils révèlent également une drôlerie très caustique qui me fait énormément rire !"
3 questions à
Susanne Schmidt
Qui sont les femmes qui composent le paysage d'Hôtel Dorothy Parker ?
Ce sont des créatures à la dérive, brisées par la solitude, qui basculent parfois dans la drogue, dans l'alcool. D'une certaine façon, ces femmes qui souvent possèdent une sensibilité exacerbée sont toutes un peu des doubles de Dorothy Parker.
Comment caractériseriez-vous l'écriture de cette écrivaine ?
C'est une écriture très détaillée, qui me fait un peu penser à un éventail de couleurs. Car on bascule sans arrêt d'un sentiment à un autre, à travers des ruptures mais aussi des glissements. J'aime beaucoup cette façon très précise qu'elle a de nous plonger au sein du monde dans lequel elle a vécu.
Que pouvez-vous dire de l'univers artistique créé par Rachel Salik ?
Il s'agit d'un tissage très poétique entre musique et théâtre, qui me donne d'ailleurs l'occasion de jouer du piano sur scène. Cela me fait très plaisir puisque j'ai grandi dans la musique : ma grand-mère était pianiste et ma mère chanteuse. Rachel Salik offre toujours à ses comédiennes une palette très riche et très variée à interpréter. Elle ne les enferme jamais dans un seul registre. Ça, c'est quelque chose de très important et
finalement d'assez rare...
Paru le 03/02/2006
HÔTEL DOROTHY PARKER DÉCHARGEURS (LES) Du mardi 10 janvier au samedi 18 mars 2006
COMÉDIE. Spectacle théâtral décapant et mélodique sur la bourgeoisie new-yorkaise des années trente, inspiré de l'oeuvre caustique de Dorothy Parker. Cette grande dame, célèbre pour ses frasques, son originalité et ses mots d'esprit, se plaisait à dire: "J'ai été pauvre et j'ai été riche, mais croyez-moi, ...
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