Interview
Bruno Wolkowitch
Dans “Mademoiselle Julie” d’Auguste Strindberg, au théâtre Marigny
Le théâtre ne lui manquait pas, mais il manquait au théâtre. Onze ans sans monter sur scène. Acteur vedette de séries télévisées, dont la célèbre "PJ", Bruno Wolkowitch retrouve les planches et les auteurs.
Pourquoi avoir cessé le théâtre durant onze ans ?
J'étais content d'arrêter le théâtre, j'y ai toujours eu peur. J'avais un rapport au fait d'être en live devant le public, complètement névrotique : je n'étais jamais heureux sur scène, je n'aimais pas que l'on me regarde en direct. Quand j'ai eu l'occasion de faire de l'image et de ne plus faire de théâtre, cela a été un soulagement. Après dix ans d'arrêt, dont cinq ans d'analyse, cela va bien ! L'an passé, avec Jean-Pierre Vincent dans Derniers remords avant l'oubli de Lagarce, je me suis régalé. Avant, je m'empoisonnais la vie pour rien ! J'ai, maintenant un relatif détachement : je sais que, au pire, ce n'est qu'une pièce de théâtre...
Comment définiriez-vous le théâtre de Strindberg ?
C'est un théâtre psychanalytique, contemporain de Freud. C'est l'un des premiers auteurs, à cette époque, qui parle de ce qui se passe dans la tête des héros. Avant, on commentait surtout des sentiments mais on n'était pas dans la complexité mentale des protagonistes. Ici on regarde les caractères, c'est de la matière humaine. Un pari fou, comme dans les films de Bergman, celui de vivre avec cette raideur protestante qui interdit tout, qui pousse à la transgression des codes dans les rapports maîtres-valets et les rapports sexuels.
Comment allez-vous vivre plusieurs mois aux côtés de votre personnage ?
Un personnage de Strindberg, cela mange un peu la tête. Un personnage de série télé mange beaucoup de temps, rapporte beaucoup d'argent... Je m'arrange au mieux pour que mon personnage n'envahisse pas trop ma vie privée, mais je ne vais pas au théâtre les mains dans les poches. C'est un travail permanent. Ma concentration sera, je crois, de marcher avant le spectacle. Au cinéma on saisit l'instant, mais il y a de longues préparations, au théâtre c'est un défi quotidien.
Craignez-vous la routine ?
Quant on vit une histoire longue avec quelqu'un, si à chaque fois les gestes de l'amour, les mots, les caresses sont les mêmes, on s'ennuie. Pareillement, un comédien qui ne cherche pas à surprendre ses partenaires, qui ne réinvente pas, c'est ennuyeux. Didier Long, le metteur en scène, prépare une structure qui n'est pas fixe mais exponentielle. Tant que l'on est dans ce chapeau que l'on compose ensemble en répétition, on va pouvoir en sortir des plumes tous les soirs qui n'auront pas forcément la même couleur. Comme si l'on vivait une histoire d'amour avec, dans le même cadre amoureux, différentes manières de s'ébattre. Dans ce que le metteur en scène propose, on va pouvoir réellement inventer en direct. Ce sont les conditions idéales pour s'amuser à jouer !
Propos recueillis
par François Varlin
J'étais content d'arrêter le théâtre, j'y ai toujours eu peur. J'avais un rapport au fait d'être en live devant le public, complètement névrotique : je n'étais jamais heureux sur scène, je n'aimais pas que l'on me regarde en direct. Quand j'ai eu l'occasion de faire de l'image et de ne plus faire de théâtre, cela a été un soulagement. Après dix ans d'arrêt, dont cinq ans d'analyse, cela va bien ! L'an passé, avec Jean-Pierre Vincent dans Derniers remords avant l'oubli de Lagarce, je me suis régalé. Avant, je m'empoisonnais la vie pour rien ! J'ai, maintenant un relatif détachement : je sais que, au pire, ce n'est qu'une pièce de théâtre...
Comment définiriez-vous le théâtre de Strindberg ?
C'est un théâtre psychanalytique, contemporain de Freud. C'est l'un des premiers auteurs, à cette époque, qui parle de ce qui se passe dans la tête des héros. Avant, on commentait surtout des sentiments mais on n'était pas dans la complexité mentale des protagonistes. Ici on regarde les caractères, c'est de la matière humaine. Un pari fou, comme dans les films de Bergman, celui de vivre avec cette raideur protestante qui interdit tout, qui pousse à la transgression des codes dans les rapports maîtres-valets et les rapports sexuels.
Comment allez-vous vivre plusieurs mois aux côtés de votre personnage ?
Un personnage de Strindberg, cela mange un peu la tête. Un personnage de série télé mange beaucoup de temps, rapporte beaucoup d'argent... Je m'arrange au mieux pour que mon personnage n'envahisse pas trop ma vie privée, mais je ne vais pas au théâtre les mains dans les poches. C'est un travail permanent. Ma concentration sera, je crois, de marcher avant le spectacle. Au cinéma on saisit l'instant, mais il y a de longues préparations, au théâtre c'est un défi quotidien.
Craignez-vous la routine ?
Quant on vit une histoire longue avec quelqu'un, si à chaque fois les gestes de l'amour, les mots, les caresses sont les mêmes, on s'ennuie. Pareillement, un comédien qui ne cherche pas à surprendre ses partenaires, qui ne réinvente pas, c'est ennuyeux. Didier Long, le metteur en scène, prépare une structure qui n'est pas fixe mais exponentielle. Tant que l'on est dans ce chapeau que l'on compose ensemble en répétition, on va pouvoir en sortir des plumes tous les soirs qui n'auront pas forcément la même couleur. Comme si l'on vivait une histoire d'amour avec, dans le même cadre amoureux, différentes manières de s'ébattre. Dans ce que le metteur en scène propose, on va pouvoir réellement inventer en direct. Ce sont les conditions idéales pour s'amuser à jouer !
Propos recueillis
par François Varlin
Paru le 14/04/2006
MADEMOISELLE JULIE THÉÂTRE MARIGNY Du jeudi 16 février au dimanche 25 juin 2006
COMÉDIE DRAMATIQUE. La nuit des feux de la Saint-Jean, sous l’influence de l’excitation charnelle de la danse, Mademoiselle Julie et le domestique de son père se jouent de la démarcation entre rêves et réalité pour descendre dans les enfers de la séduction.
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