Interview par Manuel Piolat Soleymat
Adel Hakim met en scène “La Cagnotte” au TQI
“Les personnages
Une troupe de petits-bourgeois quitte sa province natale pour s'offrir une journée de folies parisiennes. Adel Hakim transporte le vaudeville satirique d'Eugène Labiche dans l'univers d'un "Orange mécanique" burlesque.
La Cagnotte porte un regard cocasse et féroce sur la petite-bourgeoisie provinciale de la fin du XIXe siècle. Au-delà de ce contexte particulier, que raconte cette pièce sur l'être humain ?
Cette bourgeoisie est représentative de toutes les classes moyennes qui peuvent exister à toutes les époques. Elle est arrogante, égoïste, machiste, imbue de ses préjugés, agrippée à ses privilèges. Elle étale son vernis de culture, ne raisonne que par clichés, porte des œillères qui l'empêchent de voir ce qui se passe dans le monde. Lorsque, tout à coup, les codes sociaux changent et que ces petits-bourgeois se retrouvent dans un contexte qui leur est étranger, ils perdent tous leurs repères. Regardez des volailles dans un poulailler. Elles caquettent, battent des ailes, mangent, s'agitent, s'affolent, se disputent : elles ont des comportements primaires, mécaniques et stéréotypés. Et, cependant, elles sont vivantes. Elles sont féroces et pathétiques, attendrissantes et terrifiantes, craintives et hardies, fascinantes et hilarantes. Les personnages de Labiche sont comparables à des poules ! La bêtise et l'aveuglement de ces êtres sont universels, inhérents, me semble-t-il, à l'âme humaine. Et c'est précisément ce qui nous amuse.
Quelles ont été les principales orientations de votre travail de mise en scène ?
L'écriture de Labiche est comparable à une partition musicale. Elle exige une virtuosité technique de la part des acteurs. Il faut respecter le rythme et être très précis sur les "effets" de texte. Si l'on ne joue pas chacun de ces effets, on a l'impression que les répliques sont creuses, qu'il ne se passe rien. Il faut donc mettre en valeur tous les micro-événements à travers lesquels se déploie l'action de la pièce. La chorégraphie et les chants (prévus par Labiche, il s'agit d'un vaudeville) participent, bien sûr, de cette mécanique. Quant à l'esthétique, j'ai souhaité sortir de la convention liée à Labiche pour donner une représentation contemporaine et même futuriste : une espèce d'Orange mécanique burlesque.
Quels sont, de votre point de vue, les aspects les plus intéressants de ce théâtre ?
Le principal intérêt de Labiche est qu'il réussit à nous faire rire. C'est un génie de la comédie. Or, le rire et la profondeur ne sont pas antinomiques. Une bonne comédie nous en dit autant sur l'être humain qu'une puissante tragédie. Labiche passe au crible l'obsession de l'argent, de la réussite sociale associée exclusivement à l'argent. Molière montrait l'horreur d'un Harpagon, chef de famille. Labiche va beaucoup plus loin : il montre une société où il n'y a plus que des Harpagon. Et c'est la nôtre ! On pourrait s'en désespérer, mais peut-être qu'il vaut mieux en rire. ?
Cette bourgeoisie est représentative de toutes les classes moyennes qui peuvent exister à toutes les époques. Elle est arrogante, égoïste, machiste, imbue de ses préjugés, agrippée à ses privilèges. Elle étale son vernis de culture, ne raisonne que par clichés, porte des œillères qui l'empêchent de voir ce qui se passe dans le monde. Lorsque, tout à coup, les codes sociaux changent et que ces petits-bourgeois se retrouvent dans un contexte qui leur est étranger, ils perdent tous leurs repères. Regardez des volailles dans un poulailler. Elles caquettent, battent des ailes, mangent, s'agitent, s'affolent, se disputent : elles ont des comportements primaires, mécaniques et stéréotypés. Et, cependant, elles sont vivantes. Elles sont féroces et pathétiques, attendrissantes et terrifiantes, craintives et hardies, fascinantes et hilarantes. Les personnages de Labiche sont comparables à des poules ! La bêtise et l'aveuglement de ces êtres sont universels, inhérents, me semble-t-il, à l'âme humaine. Et c'est précisément ce qui nous amuse.
Quelles ont été les principales orientations de votre travail de mise en scène ?
L'écriture de Labiche est comparable à une partition musicale. Elle exige une virtuosité technique de la part des acteurs. Il faut respecter le rythme et être très précis sur les "effets" de texte. Si l'on ne joue pas chacun de ces effets, on a l'impression que les répliques sont creuses, qu'il ne se passe rien. Il faut donc mettre en valeur tous les micro-événements à travers lesquels se déploie l'action de la pièce. La chorégraphie et les chants (prévus par Labiche, il s'agit d'un vaudeville) participent, bien sûr, de cette mécanique. Quant à l'esthétique, j'ai souhaité sortir de la convention liée à Labiche pour donner une représentation contemporaine et même futuriste : une espèce d'Orange mécanique burlesque.
Quels sont, de votre point de vue, les aspects les plus intéressants de ce théâtre ?
Le principal intérêt de Labiche est qu'il réussit à nous faire rire. C'est un génie de la comédie. Or, le rire et la profondeur ne sont pas antinomiques. Une bonne comédie nous en dit autant sur l'être humain qu'une puissante tragédie. Labiche passe au crible l'obsession de l'argent, de la réussite sociale associée exclusivement à l'argent. Molière montrait l'horreur d'un Harpagon, chef de famille. Labiche va beaucoup plus loin : il montre une société où il n'y a plus que des Harpagon. Et c'est la nôtre ! On pourrait s'en désespérer, mais peut-être qu'il vaut mieux en rire. ?
Paru le 20/11/2008
(29 notes) THÉÂTRE ANTOINE VITEZ - SCÈNE D'IVRY Du jeudi 6 novembre 2008 au dimanche 30 mai 2010
COMÉDIE. Un petit groupe d’amis de La Ferté-sous-Jouarre joue aux cartes depuis des années et a constitué ainsi une cagnotte qu’il va falloir dépenser. À l’issue d’un vote sous haute surveillance, il est décidé de faire un voyage à Paris. Commence alors pour tout le groupe une folle journée parsemée d’embû...
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