Dossier par Samuel Ganes
Cyrano
Entre tradition et modernité
Le metteur en scène Henri Lazarini remonte son adaptation de «Cyrano de Bergerac» au Théâtre 14. Rencontre avec deux de ses comédiens, Benoit Solès interprétant Cyrano, et Emeric Marchand, interprétant Le Bret.
Parlons déjà du fond, cette adaptation de la pièce ?
Benoit Solès: Henri reprend donc cette version, resserrée autour des personnages principaux et qui fut créée il y a vingt ans à la Mare au Diable, puis au Ranelagh avec Patrick Préjean (nommé à l'époque au Molière du comédien). Pour autant, la mise en scène est totalement nouvelle : elle débute cette fois avec Edmond Rostand dans son cabinet de travail, relisant la pièce qu'il vient de terminer. L'auteur voit alors ses personnages prendre vie -lui-même devenant son propre Cyrano ! À travers cette représentation rêvée, la pièce s'impose alors très vite, dans sa vérité et dans ses mots. L'intérêt, c'est que l'on échappe à une certaine forme de réalisme, parfois pesante dans Cyrano. Non par faute de moyen, mais dans un réel désir de recentrer la pièce sur les rapports humains et l'intrigue pure, Henri balaye les lourdeurs de décors et la figuration pléthorique qui peuvent rendre le spectacle parfois fastidieux. Sa vision est très belle, épurée, subtile.
Emeric Marchand: C'est vrai que quand tu montes «Cyrano», c'est normalement trois heures minimum. Nous, on devrait faire autour de deux. Henri revendique dans son travail une esthétique plutôt classique. Mais paradoxalement, son adaptation modernise beaucoup la pièce. Elle prend un rythme soutenu, excluant les digressions et les scènes secondaires où l'action est absente. Il y aussi plus d'humanité, notamment dans sa façon de concevoir Cyrano. C'est traditionnellement un homme qui se cache derrière sa volubilité et son panache. Ici, Henri demande à Benoit d'aller dans une sensibilité et une fragilité rarement exploitées pour ce personnage. C'est un éclairage nouveau sur le rôle et la pièce.
Et dans la forme ?
E M : Un espace scénique où les divers lieux s'imposent par des jeux de lumière (comme pour la scène du balcon) et quelques éléments de décor. Il n'y a pas d'entracte ou de noir, et du coup, l'ensemble est fluide et assez contemporain. Visuellement c'est presque cinématographique, avec toujours des costumes riches et baroques. Cela reste assez flamboyant !
B S: Il y a aussi une volonté de rajeunir les personnages. Cyrano est ici ramené à son état de cadet (de Gascogne), tout comme Le Bret. Ce n'est pas anodin, car les rapports sont tout autres, plus fraternels, plus fougueux aussi... Pour autant, dans cette logique de « Rostand rêvant sa propre pièce », Henri a voulu qu'à l'acte V, le personnage de Roxanne soit interprété par Geneviève Casile, qui l'a joué à la Comédie-Française avec un immense succès... Dans la tradition mais pas dans la convention, esthétique mais pas indigeste, Henri propose un Cyrano audacieux.
Benoit Solès: Henri reprend donc cette version, resserrée autour des personnages principaux et qui fut créée il y a vingt ans à la Mare au Diable, puis au Ranelagh avec Patrick Préjean (nommé à l'époque au Molière du comédien). Pour autant, la mise en scène est totalement nouvelle : elle débute cette fois avec Edmond Rostand dans son cabinet de travail, relisant la pièce qu'il vient de terminer. L'auteur voit alors ses personnages prendre vie -lui-même devenant son propre Cyrano ! À travers cette représentation rêvée, la pièce s'impose alors très vite, dans sa vérité et dans ses mots. L'intérêt, c'est que l'on échappe à une certaine forme de réalisme, parfois pesante dans Cyrano. Non par faute de moyen, mais dans un réel désir de recentrer la pièce sur les rapports humains et l'intrigue pure, Henri balaye les lourdeurs de décors et la figuration pléthorique qui peuvent rendre le spectacle parfois fastidieux. Sa vision est très belle, épurée, subtile.
Emeric Marchand: C'est vrai que quand tu montes «Cyrano», c'est normalement trois heures minimum. Nous, on devrait faire autour de deux. Henri revendique dans son travail une esthétique plutôt classique. Mais paradoxalement, son adaptation modernise beaucoup la pièce. Elle prend un rythme soutenu, excluant les digressions et les scènes secondaires où l'action est absente. Il y aussi plus d'humanité, notamment dans sa façon de concevoir Cyrano. C'est traditionnellement un homme qui se cache derrière sa volubilité et son panache. Ici, Henri demande à Benoit d'aller dans une sensibilité et une fragilité rarement exploitées pour ce personnage. C'est un éclairage nouveau sur le rôle et la pièce.
Et dans la forme ?
E M : Un espace scénique où les divers lieux s'imposent par des jeux de lumière (comme pour la scène du balcon) et quelques éléments de décor. Il n'y a pas d'entracte ou de noir, et du coup, l'ensemble est fluide et assez contemporain. Visuellement c'est presque cinématographique, avec toujours des costumes riches et baroques. Cela reste assez flamboyant !
B S: Il y a aussi une volonté de rajeunir les personnages. Cyrano est ici ramené à son état de cadet (de Gascogne), tout comme Le Bret. Ce n'est pas anodin, car les rapports sont tout autres, plus fraternels, plus fougueux aussi... Pour autant, dans cette logique de « Rostand rêvant sa propre pièce », Henri a voulu qu'à l'acte V, le personnage de Roxanne soit interprété par Geneviève Casile, qui l'a joué à la Comédie-Française avec un immense succès... Dans la tradition mais pas dans la convention, esthétique mais pas indigeste, Henri propose un Cyrano audacieux.
Paru le 05/06/2015
(21 notes) THÉÂTRE 14 Du jeudi 21 mai au samedi 4 juillet 2015
COMÉDIE DRAMATIQUE. Edmond Rostand a 29 ans lorsqu'il écrit Cyrano de Bergerac. C'est un jeune homme tourmenté et romantique. Je rêve "mon" Cyrano à son image: un poète éperdu, un héros magnifique, désespéré, mais aussi un cadet de Gascogne, "Oeil d'aigle, jambe de cigogne, moustache de chat, dents de loup"... Comme ...
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