Interview par Manuel Piolat Soleymat
Philippe Adrien
«Le Bizarre incident du chien pendant la nuit», à La Tempête
Philippe Adrien porte à la scène le roman à succès de l'écrivain britannique Mark Haddon. Une enquête autour de la mort d'un chien qui révèle « l'univers logique et décalé d'un adolescent presque comme les autres ».
Comment pourriez-vous présenter Christopher, le personnage principal du «Bizarre incident du chien pendant la nuit» ?
Simon Stephens (ndlr, qui a signé l'adaptation théâtrale) dit qu'il a rassemblé dans Christopher un certain nombre des bizarreries et autres singularités de ses amis. C'est dire qu'il a voulu éviter le genre tableau clinique d'un jeune garçon autiste. Christopher n'en présente pas moins quelques traits caractéristiques : il ne supporte pas qu'on le touche, ne comprend pas les métaphores et pourrait dialoguer avec l'un d'entre nous sans jamais le regarder.
Qu'est-ce qui, dans cette histoire et cette écriture, vous a fait passer de l'intérêt au désir de mise en scène ?
J'ai lu ce texte et je me souviens avoir été immédiatement «rafraîchi». Comme si le souci de clarté, de cohérence et d'exactitude propre à l'esprit scientifique de Christopher répondait à un besoin profond: qu'un jour tout ce qui concerne pour chacun de nous la filiation et la parentalité soit abordé (et traité) avec simplicité, sans pathos. Alors que si on y réfléchit, ce dont il s'agit dans cette histoire ne peut qu'être chargé d'aspects sensibles et probablement douloureux. J'ai d'abord eu des difficultés à percevoir la singularité de l'expression orale de Christopher, comme de son écoute. Et puis il y a eu un soudain déclenchement qui a entraîné le désir de faire paraître au théâtre cette sorte d'exploration du langage.
A quelle forme de pièce l'adaptation de Simon Stephens donne-t-elle naissance ?
Il s'agit de ce qu'on appelle du « théâtre récit ». Vitez, qui en fut, dans les années 1970, l'un des réinventeurs, disait : «nous ne faisons pas ce que nous disons». Il ne me semble pas que ce soit une règle. Ce qui est amusant, c'est la possibilité, oui, de ne pas faire ce qu'on dit, mais aussi bien de le faire, ou de faire autre chose qui le contredit : soit un usage ludique du rapport entre le dialogue, l'échange de paroles, et ces sortes de didascalies prises en charge aussi bien par l'un des protagonistes que par le chœur formé par les autres acteurs.
Quelles sont les principales caractéristiques de cette écriture ?
Haddon et Stephens, l'un et l'autre, sont évidemment attachés à donner consistance, à travers ce que dit Christopher, aux particularités de son esprit. Curieusement, la poésie me semble sourdre du souci quasi maniaque de Christopher d'une représentation du monde qui n'oublie aucun détail. C'est curieux, moi qui croyais aimer par dessus tout les ellipses, je m'attends à une révélation : le charme insolite d'une parole à la fois simple, précise et extraordinairement pudique.
Comment vous emparez-vous de ce texte ?
Quel bonheur si ce récit et sa mise en scène confondus pouvaient, à l'arrivée, ne pas peser plus qu'une plume ! L'adaptation a justement la vertu d'être joueuse, de lancer parfois quelque hypothèse qui d'abord semble vite abandonnée, puis ressurgit par bribes, un peu plus loin. À nous de nous aventurer à sa suite...
Simon Stephens (ndlr, qui a signé l'adaptation théâtrale) dit qu'il a rassemblé dans Christopher un certain nombre des bizarreries et autres singularités de ses amis. C'est dire qu'il a voulu éviter le genre tableau clinique d'un jeune garçon autiste. Christopher n'en présente pas moins quelques traits caractéristiques : il ne supporte pas qu'on le touche, ne comprend pas les métaphores et pourrait dialoguer avec l'un d'entre nous sans jamais le regarder.
Qu'est-ce qui, dans cette histoire et cette écriture, vous a fait passer de l'intérêt au désir de mise en scène ?
J'ai lu ce texte et je me souviens avoir été immédiatement «rafraîchi». Comme si le souci de clarté, de cohérence et d'exactitude propre à l'esprit scientifique de Christopher répondait à un besoin profond: qu'un jour tout ce qui concerne pour chacun de nous la filiation et la parentalité soit abordé (et traité) avec simplicité, sans pathos. Alors que si on y réfléchit, ce dont il s'agit dans cette histoire ne peut qu'être chargé d'aspects sensibles et probablement douloureux. J'ai d'abord eu des difficultés à percevoir la singularité de l'expression orale de Christopher, comme de son écoute. Et puis il y a eu un soudain déclenchement qui a entraîné le désir de faire paraître au théâtre cette sorte d'exploration du langage.
A quelle forme de pièce l'adaptation de Simon Stephens donne-t-elle naissance ?
Il s'agit de ce qu'on appelle du « théâtre récit ». Vitez, qui en fut, dans les années 1970, l'un des réinventeurs, disait : «nous ne faisons pas ce que nous disons». Il ne me semble pas que ce soit une règle. Ce qui est amusant, c'est la possibilité, oui, de ne pas faire ce qu'on dit, mais aussi bien de le faire, ou de faire autre chose qui le contredit : soit un usage ludique du rapport entre le dialogue, l'échange de paroles, et ces sortes de didascalies prises en charge aussi bien par l'un des protagonistes que par le chœur formé par les autres acteurs.
Quelles sont les principales caractéristiques de cette écriture ?
Haddon et Stephens, l'un et l'autre, sont évidemment attachés à donner consistance, à travers ce que dit Christopher, aux particularités de son esprit. Curieusement, la poésie me semble sourdre du souci quasi maniaque de Christopher d'une représentation du monde qui n'oublie aucun détail. C'est curieux, moi qui croyais aimer par dessus tout les ellipses, je m'attends à une révélation : le charme insolite d'une parole à la fois simple, précise et extraordinairement pudique.
Comment vous emparez-vous de ce texte ?
Quel bonheur si ce récit et sa mise en scène confondus pouvaient, à l'arrivée, ne pas peser plus qu'une plume ! L'adaptation a justement la vertu d'être joueuse, de lancer parfois quelque hypothèse qui d'abord semble vite abandonnée, puis ressurgit par bribes, un peu plus loin. À nous de nous aventurer à sa suite...
Paru le 13/10/2015
(50 notes) Cartoucherie - La Tempête Du vendredi 11 septembre 2015 au dimanche 28 mai 2017
COMÉDIE DRAMATIQUE. Christopher a quinze ans. Il comprend les mathématiques et la théorie de la relativité. Ce qu’il ne comprend pas bien, ce sont les autres êtres humains. Il aime les listes, les plans et la vérité. Il déteste le jaune et le marron. Il n’est jamais seul plus loin que le bout de sa rue. Pourtant, lor...
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