Dossier par Alain Bugnard
Les Flottants
Bertrand Degrémont & Jean-Loïc François. Au Lucernaire
Une jeune femme est quittée par son futur époux le jour même de leur mariage... Sous ses allures de conte, cette comédie dramatique de Sonia Nemirovsky interroge le rapport au temps et à l'amour de toute une génération, engluée dans les fils de la toile de l'araignée virtuelle mondialiste dont elle est devenue l'esclave.
Bertrand Degrémont, mise en scène
« Sonia Nemirovsky a créé cette pièce il y a trois ans au Théâtre de Belleville. En raison de ses nombreux engagements, elle n'arrivait pas à développer sa propre mise en scène. Aussi lui ai-je proposé de tout reprendre à zéro. J'avais travaillé avec elle sur "Le Vol", en 2015, où il était question de la dictature en Argentine. Sonia utilise ici les codes du conte pour raconter une rupture amoureuse et le début d'une nouvelle vie : la Rousse est quittée par le Marin pour aller avec la Sirène. J'ai placé l'intrigue dans le cadre d'une noce avortée : le Marin y est attendu par la Rousse pour l'épouser mais n'arrive jamais. Le décor évoque une salle des fêtes à 4 heures du matin. La mariée a bu avec son invité ; la table est défaite ; un karaoké chante du Dalida à n'en plus finir ! J'ai aussi travaillé l'identité des personnages, la Sirène étant l'archétype de l'idéal féminin, le Marin, le cliché contemporain de la virilité. Une voix omniprésente, celle des réseaux sociaux, qui parle de tout, se mêle de tout, mélange tout (comme le fil d'actualité de Facebook) est source de comédie : elle se veut informative mais fait de la désinformation, disant tout et son contraire avec le même aplomb. Nous sommes dans la critique de l'utilisation des médias et des réseaux sociaux, reposant sur le mensonge, et qui sont à l'origine d'une génération sacrifiée sur l'hôtel de la solitude, derrière ses écrans. »
Jean-Loïc François est le Détective
« J'ai été séduit par le caractère drôle, sensible et intimiste de cette pièce qui nous amène à traiter une jolie palette de sentiments. Chaque personnage a une couleur très définie et ce mélange est à la fois harmonieux et détonnant ! La rupture entre la Rousse et le Marin entraîne une sorte de fin du monde. Mon personnage, le Détective, est l'invité qui se fait suer. Il voudrait se barrer mais se retrouve partie prenante d'une situation qui ne le concerne pas et le met à côté de la plaque. Symboliquement, il est celui qui essaie de comprendre où est passé l'amour. Ce qui l'amène à avoir un regard critique sur le Jardinier qui s'occupe de l'Arbre de l'Amour. Ce dernier regarde patiemment son arbre pousser, se fortifier et affronter les tempêtes, mais il est dans la frustration de l'éternel meilleur ami. La pièce interroge notre rapport au temps, à l'impatience, à la consommation, dans cette société où tout va très vite et rien ne dure, où les gens se voient deux fois avant de passer définitivement à autre chose. Elle interroge le mariage (ne serait-il pas une image de conte de fées ?) et pose ces questions : comment fantasme-t-on sa vie future, le grand amour, et comment réagit-on aux événements qui empêchent notre quête de s'accomplir ? »
Paru le 17/05/2017
(3 notes) THÉÂTRE DU LUCERNAIRE Du mercredi 17 mai au samedi 1 juillet 2017
COMÉDIE. Dans une ville portuaire un Marin et une Rousse s’aimaient. La Noce était prête... C’était sans compter sur le chant des sirènes. Alors que le marié quitte la fête et que la tempête fait rage, on danse, on exulte, on rit. Le début d’une nouvelle vie.
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