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Juan Hernandez
Interview par Manuel Piolat Soleymat
Alexandra Lamy actuellement dans Théorbe
Chouchou… sans Loulou !

Si elle doit sa notoriété au rôle de Chouchou qu'elle interprétait à la télévision dans "Un gars, une fille", Alexandra Lamy a fait ses débuts de comédienne au théâtre. Aujourd'hui, elle revient à ses premières amours sous la direction de Didier Long dans "Théorbe", une comédie dramatique de Christian Siméon. Elle répond à nos questions avec la bonne humeur et le naturel d'une jeune femme de 31 ans à qui la réussite n'est pas montée à la tête.
Après quatre ans de succès, pourquoi avez-vous décidé d'arrêter Un gars, une fille ?
C'est une décision que Jean Dujardin (ndlr : son partenaire dans Un gars, une fille) et moi avons prise ensemble. Nous avons tous les deux ressenti la même lassitude en même temps, la peur de se répéter. Au bout d'un moment, il faut savoir s'arrêter et se dire "j'ai fait le tour de mon personnage, je ne peux plus le faire évoluer, j'arrête !".

Sans la moindre peur de passer à autre chose ?
Si, c'est vrai, car le personnage de Chouchou a eu beaucoup de succès. Maintenant, pour faire de nouveau du comique, il faudra trouver d'autres types d'humour pour d'autres personnages...

Et aujourd'hui, pour votre retour au théâtre, vous avez l'impression que l'on vous attend au tournant ?
Un peu, oui ! J'ai la trouille, c'est terrible ! Les gens doivent se dire "Bon, alors, qu'est-ce qu'elle va nous faire Alexandra Lamy, parce que maintenant qu'elle est sur une scène de théâtre, on va voir de quoi elle est capable !". Après le succès d'Un gars, une fille, j'ai l'impression de ne plus avoir le droit à l'erreur. C'est Sarah Bernhardt, d'ailleurs, qui disait que le trac vient avec les années...

Après cette longue absence, la scène vous a-t-elle manqué ?
Beaucoup ! Car j'aime vraiment le théâtre, l'ambiance qu'il y a tout autour, répéter, les loges, l'équipe, la troupe qui se forme... Un théâtre, ça a une âme, une histoire. J'adore aussi avoir le trac avant d'entrer en scène, c'est complètement maso, mais c'est comme ça !

Et comment gérez-vous cette peur ?
J'essaie de faire en sorte qu'elle ne me paralyse pas. En fait, il y a un moment où il faut que je me dise : "Bon, ma fille, t'es la meilleure, tu vas gagner, tu vas tous les embarquer !" Je me motive comme ça et puis je me lance. C'est comme un saut en parachute !

Et une fois sur scène, ce n'est plus que du plaisir ?
Si tout se passe bien, oui ! C'est vraiment super agréable de sentir qu'on emporte le public vers une histoire, de faire évoluer son personnage pendant une heure et demie. Parce qu'au cinéma, même si j'adore ça, on vient parfois sur le tournage pour ouvrir une porte et dire : "À demain !" Et puis le réalisateur crie : "Coupez ! Voilà, la journée est finie pour Alexandra !" Et là, vous pensez : "Mais mince, qu'est-ce que je fais, un boulot de fainéant ou quoi ?"

Quels types de rôles vous confiait-on avant de faire de la télévision ?
En fait, il y a eu deux périodes. D'abord, les cinq années durant lesquelles j'étais élève au conservatoire de Nîmes. On me donnait toujours des rôles dramatiques. Sans doute parce que j'avais une voix un peu grave. Je me sentais très bien là-dedans, d'ailleurs.

Des rôles de jeunes premières ?
Pas forcément. En fait, ce n'était pas là où j'étais la meilleure. Peut-être justement car j'avais une voix trop voilée. Donc ça sonnait comme des jeunes premières qui avaient déjà un peu de rouille, un peu trop de bouteille ! Et puis il faut dire que ces rôles-là ne m'ont jamais beaucoup intéressée.

Et ensuite, on vous a demandé de faire de la comédie ?
C'est ça. C'est lorsque je suis arrivée à Paris, après le conservatoire, que l'on a commencé à me faire jouer des rôles comiques. Je ne sais pas pourquoi ! Au début, ça a été très difficile, parce que, intuitivement, je me sens beaucoup plus à l'aise dans le drame que dans l'humour. Maintenant, ça va mieux, mais je trouve toujours particulièrement dur de déclencher un rire...

Avez-vous longuement hésité avant d'accepter le rôle de Jeanne dans Théorbe ?
Pas une seconde ! J'ai eu un véritable coup de foudre pour ce texte ! Dès la première lecture, j'ai été littéralement retournée, en larmes. J'ai tout de suite appelé Didier Long pour lui dire : "C'est génial, je veux jouer ce rôle-là !"

C'est une pièce qui se déroule le 11 septembre 2001 à New York... Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
J'interprète le rôle d'une jeune musicienne qui joue du théorbe, une sorte de luth ancien. Au matin du 11 septembre, elle doit passer une audition très importante avec un chef d'orchestre célèbre. Elle se prépare et lorsqu'elle s'apprête à sortir, elle se rend compte que Greg, son petit ami, qui travaille dans l'une des deux tours, est parti avec son trousseau de clefs en l'enfermant dans l'appartement. Dès le début de la pièce, il y a un compte à rebours qui se met en place. Évidemment, le public sait quel drame va avoir lieu ce jour-là. Ce qu'il ne sait pas, c'est si Greg va quitter son travail pour venir lui ouvrir la porte comme elle le lui demande au téléphone, et ainsi échapper à l'attentat... Un contraste se crée entre le public qui est au courant de la catastrophe à venir et Jeanne qui ne se doute de rien, qui évolue avec légèreté, qui est très amusante.

Qu'est-ce qui vous a séduite dans Théorbe ?
Il s'agit d'une pièce qui, tout en étant bouleversante, laisse une grande place à l'humour. Et je trouve ça très intéressant. C'est la petite histoire dans la grande. Sans pour cela que ce soit un texte politique. On voit vivre une jeune femme tout à fait normale ; ça pourrait être moi ou quelqu'un d'autre. Et puis, il y a le drame...

Quel genre de rôle vous intéresse en général ?
C'est typiquement celui de Jeanne. Parce qu'elle a une palette d'émotions extraordinaire. Elle est drôle, mais aussi par moments triste, émue, paniquée... Elle passe d'un état à l'autre et j'aime ça, interpréter toutes ces nuances, ces changements d'humeurs, de sentiments.

Quelles sont les comédiennes dont la carrière vous semble exemplaire ?
J'aime beaucoup Nicole Kidman. D'abord, parce qu'elle fait de très bons choix de films, qu'elle joue au théâtre, et puis parce que c'est une
excellente comédienne ! J'ai adoré The Hours et aussi Dogville dans lequel je l'ai trouvée étonnante. Il y a également Meryl Streep, que j'ai vraiment aimée dans Sur la route de Madison. Ce sont des actrices à fleur de peau, et qui ont de vraies personnalités.

Et en France ?
J'ai beaucoup d'admiration pour Geneviève Page et Danielle Darrieux. Si je pouvais avoir une carrière aussi belle que la leur, je serais la plus heureuse des femmes ! Et parmi les plus jeunes comédiennes, je trouve Sylvie Testud particulièrement talentueuse, vraiment au tout premier rang de sa génération.

Vous êtes présidente d'honneur d'une école de théâtre qui ouvre cette année. Pouvez-vous nous en parler ?
Oui, il s'agit du "Cours", l'école de la Comédie des Champs-Élysées créée par Sophie Kerbellec et Philippe Suner, en collaboration avec Michel Fagadeau.

Pourquoi une école de plus à Paris ?
Parce qu'il n'existait pas d'école où l'on puisse, en dehors de la comédie pure, apprendre d'autres activités comme le chant, la danse, l'anglais, le yoga, l'escrime... Les élèves travailleront aussi sur la caméra, la voix... Toutes ces choses manquaient dans les cours à Paris, contrairement à Londres où ils sont très forts pour ça. Je pense que pour devenir comédien, il est utile d'avoir une formation très complète, de toucher au plus grand nombre de domaines possibles.

Quels sont vos projets après Théorbe ?
Rien de très précis pour l'instant. Il y a Jean Dujardin qui prépare son film mais je ne peux pas trop en parler pour le moment. Je pense que l'on devrait se retrouver à cette occasion-là.

L'auteur : Christian Siméon

Il porte sur la scène des personnages souvent réels, réinterprète les destinées d'antihéros monstrueux et manipulateurs. Très rythmées, jouant de contrastes et de ruptures, ses pièces donnent une place particulière au corps et à la matière. Rien d'étonnant à cela : Christian Siméon partage son temps entre l'écriture et la sculpture.

1992 Hécate ; deuxième prix du concours "Premières Répliques" 1996 du Théâtre d'Angoulême *1995 Hyènes ou le monologue de Théodore-Frédéric Benoît ; création en 1997 au Dix-Huit Théâtre - mise en scène de Jean Macqueron * 1998 L'Androcée ; création en 2002 à L'Étoile du Nord - mise en scène de Jean Macqueron * 1998 La Priapée des écrevisses ; création en 2002 à la Pépinière Opéra par Marilu Marini - mise en scène de Jean-Michel Ribes * 1999 La Reine écartelée ; d'après Amy Robsart de Victor Hugo - création en 1999 à L'Étoile du Nord - mise en scène de Jean Macqueron * 2000 Les Eaux lourdes ; mise en espace au Studio de la Comédie-Française en 2001 par Didier Long, dans le cadre de "Carte blanche à la Fondation Beaumarchais". 2001 Factory ; courte pièce interactive pour 7 comédiens, 2 cameramen et 2 caméras infrarouges. 2003 Landru et Fantaisies ; création en 2003 à L'Étoile du Nord - mise en scène de Jean Macqueron * 2003 Théorbe ; création en 2003 au Petit Théâtre de Paris - mise en scène de Didier Long.

Télégramme
Alexandra - stop - sors de Théorbe - stop - t'ai trouvée - stop - pétillante - stop - captivante - stop - virevoltante - stop - envoûtante - stop - bluffante - stop - bandante - stop - d'ailleurs - stop - j'arrête là - stop - sinon tu vas choper la carafe ! - stop. Jean Dujardin
Paru le 18/11/2003
THÉORBE
THÉÂTRE DE PARIS - SALLE RÉJANE
Du mardi 7 octobre 2003 au dimanche 18 janvier 2004

COMÉDIE DRAMATIQUE. "New York, 7h38, le mardi 11 septembre 2001." Jeanne, instrumentiste française qui joue du théorbe (luth ancien) et doit passer une audition importante dans la matinée, s'aperçoit que son petit ami l'a enfermée dans l'appartement en partant travailler. Armée de son seul téléphone, elle va explorer...

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