Interview par Philippe Escalier
Xavier Lemaire
Le théâtre La Bruyère met à l'affiche "La-bas, de l'autre côté de l'eau" la grande fresque théâtrale de Pierre-Olivier Scotto sur le thème de la guerre d'Algérie à partir du 22 septembre 2021. Son metteur en scène, Xavier Lemaire, nous a parlé de l'un des spectacles marquants de la rentrée
Peut-on revenir sur la genèse de « La-bas, de l'autre côté de l'eau » ?
Je travaille de façon très complice avec Pierre-Olivier Scotto. Je dirais que j'amène l'idée, une partie du scénario, et lui ensuite fait son immense travail d'auteur. Nous l'avons conçu en 2016 et nous y avons travaillé trois ans. C'était un vieux rêve pour moi de pouvoir monter une pièce, dépourvue d'idéologie, humaniste, sur la guerre d'Algérie, abordée sous l'angle de la tragédie avec des protagonistes qui ont tous des raisons légitimes de se défendre. Ceux qui sont là depuis 130 ans, qui ont construit, (on vit rarement pendant 6 ou 7 générations au même endroit) et ceux qui disent, nous n'avons aucun droit, aucune considération et nous avons autant construit que vous !
Il faut noter la particularité de la terre d'Algérie qui telle qu'elle existe aujourd'hui, est un acquis colonial : avant, c'était une régence ottomane avec à côté, la Kabylie, les Berbères, le Dey du Maroc et de Tunis. Ceci posé, l'on part d'une aventure amoureuse entre une française et un algérien avant que n'arrive un jeune du contingent. Nait alors une histoire à trois, une espèce de Jules et Jim permettant à chaque camp de s'exprimer librement. Avec, en toile de fond, un drame puisque la montée en tension favorise toujours les extrémismes qui broient les individus.
33 tableaux vont permettre de suivre la destinée de cette époque, avec des aller-retour, un scénario très cinématographique donnant à la pièce une dimension épique. À la première qui a eu lieu le 25 février 2020 au théâtre André Malraux de Rueil-Malmaison, nous avons reçu un accueil incroyable avec dix minutes de standing ovation.
Vous apportez donc la preuve qu'un sujet historique, encore douloureux, peut interpeler et passionner le public !
Oui et pour une bonne raison, c'est probablement l'un des sujets les plus actuels : beaucoup des problèmes que nous vivons aujourd'hui viennent du fait que nous n'avons pas résolu cette partie de notre passé. En sortant de la représentation, des spectateurs d'origine algérienne m'ont dit avoir eu, pour la première fois, de la compassion pour les pieds-noirs, et ces derniers m'ont affirmé avec émotion qu'ils n'avaient pas toujours tout saisi de leurs responsabilités. Avec Pierre-Olivier Scotto, nous voulions raconter ce que l'on a jamais réussi à dire, parce que les plaies sont restées trop béantes. Le théâtre doit permettre de poser les problèmes, sans imposer une façon de penser.
C'est une vraie troupe qui va jouer cette pièce. Comment faites-vous votre casting ?
J'applique la théorie des 3 tiers :1/3 d'acteurs avec qui j'ai l'habitude de travailler, 1/3 avec qui je souhaite travailler et 1/3 que je ne connais pas, notamment des jeunes à qui il faut donner leur chance. Ces mélanges créent vraiment une force dans la troupe, fort utile ici car ce spectacle est une gageure : 12 acteurs, 3 techniciens, 79 costumes, 33 changements de décors ! Nous faisons le pari d'un théâtre avec une troupe formidable et un texte magnifique, capables de rassembler, d'interroger et de donner des émotions !
Je travaille de façon très complice avec Pierre-Olivier Scotto. Je dirais que j'amène l'idée, une partie du scénario, et lui ensuite fait son immense travail d'auteur. Nous l'avons conçu en 2016 et nous y avons travaillé trois ans. C'était un vieux rêve pour moi de pouvoir monter une pièce, dépourvue d'idéologie, humaniste, sur la guerre d'Algérie, abordée sous l'angle de la tragédie avec des protagonistes qui ont tous des raisons légitimes de se défendre. Ceux qui sont là depuis 130 ans, qui ont construit, (on vit rarement pendant 6 ou 7 générations au même endroit) et ceux qui disent, nous n'avons aucun droit, aucune considération et nous avons autant construit que vous !
Il faut noter la particularité de la terre d'Algérie qui telle qu'elle existe aujourd'hui, est un acquis colonial : avant, c'était une régence ottomane avec à côté, la Kabylie, les Berbères, le Dey du Maroc et de Tunis. Ceci posé, l'on part d'une aventure amoureuse entre une française et un algérien avant que n'arrive un jeune du contingent. Nait alors une histoire à trois, une espèce de Jules et Jim permettant à chaque camp de s'exprimer librement. Avec, en toile de fond, un drame puisque la montée en tension favorise toujours les extrémismes qui broient les individus.
33 tableaux vont permettre de suivre la destinée de cette époque, avec des aller-retour, un scénario très cinématographique donnant à la pièce une dimension épique. À la première qui a eu lieu le 25 février 2020 au théâtre André Malraux de Rueil-Malmaison, nous avons reçu un accueil incroyable avec dix minutes de standing ovation.
Vous apportez donc la preuve qu'un sujet historique, encore douloureux, peut interpeler et passionner le public !
Oui et pour une bonne raison, c'est probablement l'un des sujets les plus actuels : beaucoup des problèmes que nous vivons aujourd'hui viennent du fait que nous n'avons pas résolu cette partie de notre passé. En sortant de la représentation, des spectateurs d'origine algérienne m'ont dit avoir eu, pour la première fois, de la compassion pour les pieds-noirs, et ces derniers m'ont affirmé avec émotion qu'ils n'avaient pas toujours tout saisi de leurs responsabilités. Avec Pierre-Olivier Scotto, nous voulions raconter ce que l'on a jamais réussi à dire, parce que les plaies sont restées trop béantes. Le théâtre doit permettre de poser les problèmes, sans imposer une façon de penser.
C'est une vraie troupe qui va jouer cette pièce. Comment faites-vous votre casting ?
J'applique la théorie des 3 tiers :1/3 d'acteurs avec qui j'ai l'habitude de travailler, 1/3 avec qui je souhaite travailler et 1/3 que je ne connais pas, notamment des jeunes à qui il faut donner leur chance. Ces mélanges créent vraiment une force dans la troupe, fort utile ici car ce spectacle est une gageure : 12 acteurs, 3 techniciens, 79 costumes, 33 changements de décors ! Nous faisons le pari d'un théâtre avec une troupe formidable et un texte magnifique, capables de rassembler, d'interroger et de donner des émotions !
Paru le 18/12/2021
(106 notes) THÉÂTRE ACTUEL / LA BRUYÈRE Du mercredi 22 septembre au samedi 18 décembre 2021
COMÉDIE DRAMATIQUE. Alger 1956. France, 18 ans, passionnée, rêve de cinéma et de comédie française. Elle est amoureuse de Moktar, jeune révolutionnaire jusqu’à ce que Jean Paul, jeune soldat appelé, débarque dans sa vie et lui fasse rêver de Paris... Le tourbillon des événements de l'Histoire va les entraîner dans un...
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