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Noémie de Lattre
© François Fonty
Dossier par Philippe Escalier
Trois Femmes humoristiques

Sandrine Sarroche, Noémie de Lattre et Olivia Moore vont nous offrir une belle rentrée 2021 sous le signe de l'humour décapant.
Sandrine Sarroche
À partir du 8 octobre, vous êtes à l'affiche du Théâtre des Nouveautés, les vendredis et samedis jusqu'à fin décembre. Que vont découvrir ceux qui vous connaissent uniquement sur grand écran ?
Sur scène, je suis un peu moins politique, plus sociétale à travers mon parcours (où je me raconte en mixant un peu de fiction à beaucoup de réalité). A la fin du spectacle, je reprends le best-off des chansons de chroniques, pour éviter de frustrer le public qui me connaît par l'émission. Le spectacle évolue donc en permanence.

Vous serez aussi une fois par semaine dans l'émission TPMP de C8 tout en restant sur Paris 1ere. Comment voyez-vous cette nouvelle expérience ?
Quand on commence quelque chose on ne sait jamais comment cela va évoluer. À mes débuts sur Paris Première, je ne chantais pas. Si j'avais dit que je voulais chanter, on m'aurait dit « merci, au revoir » ! Et je sais que la première année, ils voulaient que j'arrête mes chansons alors que maintenant ils les diffusent à la fin du journal d'M6.
On vient vous chercher pour ce que vous êtes, mais il faut toujours s'adapter à son auditoire. La difficulté pour moi est de continuer à faire ce que je sais faire et que cela marche auprès d'un autre public. J'évite de me mettre la rate au court-bouillon. Ce n'est que de la télé !
J'ai en moi une enfant rebelle qui me pousse à faire ce que l'on déconseille ! Quoique l'on fasse, rien n'est simple lorsqu'on veut faire preuve d'audace. Qui ne prend aucun risque, n'abime pas son image mais n'avance pas. C'est comme quand on veut faire du ski, il faut bien se lancer !

Et vous avez décidé de prendre toutes les pistes noires ?
Un peu ! C'est mon côté toulonnais, un peu tête brulée, prise de risques ! Cela n'exclut pas la peur, mais sans peur il n'y a pas de courage, qualité qui figure en bonne place dans le Panthéon de mes valeurs préférées.

Revenons à la chanson : c'est vraiment votre dada !
Au cours d'un festival d'Avignon, Philippe Lellouche m'avait dit que j'étais une chansonnière de luxe. J'aime bien cette définition qui me rattache à une grande tradition. Beaumarchais disait : « En France, tout finit par des chansons » ! J'aime dire quelque chose en le chantant, c'est à la fois doux et percutant. C'est désormais ma spécificité, ma façon de m'exprimer, je la revendique, elle est naturelle chez moi : je chante depuis toujours !


Noémie de Lattre

Avant de jouer en tournée « La Dernière lettre » de Violaine Arsac et après avoir créé «Sabbat» spectacle sur les sorcières, vous reprenez à partir du 26 septembre votre seule en scène « Féministe pour Homme » à la Pépinière. Comment abordez-vous ce sujet si présent dans l'actualité ?
Mon angle d'attaque a été de faire quelque chose de léger, gai, agréable à regarder. Il fallait que ce bon moment soit l'occasion de se poser des questions dans des domaines où tout paraissait évident. Je tiens à aborder simplement et légèrement tous les thèmes du féminisme : c'est un peu une gageure ! Et je fais mienne cette citation de Thérèse Clerc : « Le rire, on dit que c'est le propre de l'homme mais je pense que c'est la libération des femmes ».

Vous avez de nombreuses casquettes : metteuse en scène, actrice, autrice, humoriste, romancière, essayiste. Comment faire dans un pays qui adore les étiquettes pour ne pas être cataloguée ?
J'en ai beaucoup souffert notamment quand j'étais sur France-Inter où l'on voyait de moi que mon côté humoriste. J'ai dû arrêter la radio de manière un peu brutale pour sortir de ce piège. J'ai lutté des années durant pour rendre visible et faire reconnaitre mes différentes activités pour lesquelles je suis reconnue aujourd'hui.

Être humoriste aujourd'hui, c'est facile ?
Pas toujours mais c'est un bon combat. Il est important que toutes les paroles se libèrent en respectant les minorités, si cela peut rendre certaines vies plus faciles, alors, cela en vaut la peine. Œuvrons pour changer le monde et ensuite nous pourrons faire toutes les blagues que nous voulons !

Avec « La Dernière lettre » de Violaine Arsac que vous continuer à jouer, on vous voit aller vers un registre plus dramatique. Je suis sûr que cela vous ravit ?
Oui, en effet. J'ai commencé à faire rire, alors que je me rêvais en tragédienne. J'avais un pudeur qui me cantonnait dans l'humour. Les choses changent progressivement, tout en sachant que la gravité seule m'intéresse, pas le sérieux !


Olivia Moore

«Égoiste» sera donné à la Comédie de Paris à partir du 14 septembre sous une forme retravaillée. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?
Le spectacle à été rodé à La Nouvelle Scène pendant un an. J'ai besoin de ça, j'écris beaucoup sur scène, j'improvise, je vois si ça fonctionne. Avec le public, je me sens comme un soliste avec son orchestre et la qualité du spectacle tient (presque) autant à eux qu'à moi. La magie qui se créée, réside là. Donc mon spectacle a pu évoluer et il arrive dans sa forme définitive.

Votre humour est fait de choses assez différentes. Comment vous définiriez-vous ?
Je suis très frontale, très crue (mon spectacle est déconseillé au moins de 14 ans!) et en même temps, j'aime l'élégance. Je dis que je suis cru et class. J'aime aborder des sujets comme la séduction et la sexualité. L'idée de secouer les idées reçues m'a toujours séduite.

Quel est votre rapport au politiquement correct ?
Je comprends très bien que l'on soit plus exigeant avec ceux qui prennent la parole en public. Parler en public est une responsabilité, être écouté, est un privilège. Je pense que l'on peut faire des blagues sur tout, mais il faut qu'elles soient très bonnes pour que l'on vous pardonne d'avoir dit une horreur !

La femme que vous admirez le plus... à part vous ?
(Rires)...Il y en a beaucoup. J'ai envie de vous citer Chimamanda Ngozi, qui a écrit «Americanah» qui parle si bien des problèmes de racisme et de domination. J'aurai pu rajouter Colette, mais il faudrait lui reprocher son manque de solidarité avec les autres femmes. Pour moi, la coopération et l'entraide sont essentielles !
Paru le 10/12/2021