Philippe, pourquoi « Car/Men » ?
Et pourquoi pas ? (Rires). Quand je pense à des idées de spectacles, j'en ai beaucoup. Je travaille à l'instinct, mes idées sont comme des petites graines que je plante puis, à un moment donné, il y en a une qui grandit plus que les autres. Je voulais pousser le jeu du masculin et du féminin, faire un hymne à la tolérance, pouvoir travailler avec des hommes sur cette icône représentant la femme libérée dans toute sa splendeur. «Car/Men» me donnait aussi l'occasion de raconter mes dix ans passés en Espagne sur des airs d'opéra et en abordant l'essence de l'œuvre. La musique et la voix sont très puissantes pour moi, elles m'inspirent beaucoup. Mon premier travail consiste d'ailleurs à faire une playlist.

À part la musique, quels sont les domaines qu'il faut particulièrement travailler pour un de vos spectacles ?
Tout est important mais en particulier les costumes avec Corinne Petitpierre et le casting. Après « Tutu », j'ai reçu plus de 300 CV et le choix de mes danseurs est essentiel. J'ai besoin de savoir qu'ils vont me suivre dans mon projet, dans mes idées, mes délires et qu'ils vont m'inspirer comme Samir M'Kirech dans le solo du taureau.

Quand on voit votre capacité à vous renouveler, on se dit que vous avez un style, une pâte, dont la parodie fait partie intégrante depuis « Chicos Mambo », mais pas de recettes !
Oui, si j'avais la recette, je ne serais pas là, j'aurais fait tellement de succès que je bronzerais sur une ile paradisiaque ! On m'a proposé « Tutu 2 », mais ça ne m'intéresse pas, j'aime les défis, m'attaquer à des choses nouvelles, très connues, c'est ce qui est excitant. « Chicos Mambo » ce sont des garçons qui font rire en dansant, depuis, je pense que mon public ne comprendrait pas qu'il n'y ait pas de rires pendant les représentations et ce sera toujours présent dans mes créations. Mais ce côté humoristique n'est pas automatique. Dans «Tutu » j'ai créé des scènes plus poétiques. Si je n'ai pas besoin que les gens rient tout le temps, j'aime faire de la danse une comédie. C'est un domaine où l'humour est rare, certains s'y frottent mais pas trop parce que ça ferait mauvais genre. Moi j'assume ! Et puis faire rire, il faut y aller, c'est très difficile, c'est une technique, un équilibre, un sens du rythme, il faut que ça tombe juste. Pour les danseurs c'est aussi un travail, ils ne sont pas habitués à avoir ce retour. Je leur répète souvent qu'avec le public il y a un nouvel acteur qui met des pauses dans le spectacle et fait entendre ses réactions. Ceci pour dire que je pense avoir une petite valeur ajoutée dont je suis plutôt fier : les spectateurs ont vraiment besoin qu'on leur propose des choses belles et réjouissantes.