Entrez donc au Lepic, et découvrez sur scène le magnifique et inventif décor, aussi bien appartement, café que bureau des lignes téléphoniques. Nos trois demoiselles venues de milieux sociaux bien différents travaillent pour le plaisir, comme pour gagner leurs vies. Marthe veut à tout prix trouver un bon parti, rêve d'un beau mariage et d'enfants. Denise, jeune fille de la bourgeoisie un peu rebelle, vit sa vie pour se détacher de son destin tout tracé. Enfin, la nouvelle arrivée, Jeanne, provinciale un peu franchouillarde, n'est pas vraiment du genre à respecter le protocole.
Ce trio infernal des « demoiselles du téléphone », drôle et plein de fraicheur, va très rapidement avoir une bonne idée, celle d'inventer, sans vraiment le vouloir, le téléphone rose. En cherchant un bon parti à Marthe, elles vont finalement noter dans leur petit carnet toutes les lignes des messieurs souhaitant bien entendre leurs jolies voix et des mots doux, en échange de nombreux cadeaux.

Les trois comédiennes sont rayonnantes chacune dans leurs rôles. Odile Blanchet est Marthe avec beaucoup de pudeur (au départ !) et d'humour. Bérénice Boccara maîtrise parfaitement les codes sociaux dignes de Denise, et Sana Puis se révèle dans son rôle décalé de Jeanne, par son langage et sa gestuelle. Parfois, dans l'exagération (pour notre plus grand plaisir), les portes claquent, les téléphones sonnent et les combinés sont raccrochés avec violence, et vous virevolterez dans cette ambiance féminine de 1920, gorgée d'amitié, de tendresse, et non sans humour. Elles feront face à de nombreux ennuis et des convoitises masculines sur leur business, sans jamais faillir.
Finalement, Marthe, Denise et Jeanne pourraient tout aussi bien vivre en 2022. Car avant le côté historique et comique de cette pièce, on sent très rapidement le côté féministe. Ces trois jeunes femmes veulent vivre, travailler, être et ne pas se soumettre à ces messieurs.

Si pour certains, les téléphones fixent sont déjà de l'histoire ancienne, il est très plaisant de croire (et d'y croire !) que ces trois demoiselles sont les cerveaux de cette invention qu'est le téléphone rose, disparu aujourd'hui mais connu de tous les âges. Odile Blanchet, Bérénice Boccara et Sana Puis sont réellement pleines de talent, et je suis impatiente de découvrir leur prochaine création. D'ici là, un seul mot d'ordre : attrapez votre téléphone, réservez votre place et courez les applaudir !