Dossier par François Varlin
Trois Jours de pluie
Cet automne, Jean-Marie Besset adapte et met en scène, avec Gilbert Desveaux au théâtre de l'Atelier, "Trois Jours de pluie" de Richard Greenberg. Une pièce à trois personnages où, dans la seconde partie, les comédiens jouent les parents des enfants qu'ils incarnent dans la première. Léa Drucker, Pierre Cassignard et Mathieu Bisson, sont les heureux protagonistes de ce spectacle.
Léa Drucker :
"Un travail d'imagination"
Quel bilan faites-vous de votre dernière saison théâtrale ?
Je ne m'attendais pas à jouer si longtemps 84 Charing Cross Road. C'était une joie de travailler dans ce théâtre de l'Atelier et une vraie rencontre avec un public venu avec régularité. Aussi une belle expérience que de jouer cette pièce à deux personnages, sans jamais se regarder sur scène. Cela m'a permis d'explorer bien des voies et de comprendre beaucoup de choses sur ce travail. J'avais déjà fait de longues tournées, pourtant c'était la première fois que je jouais de manière continue. Mais je ne suis pas restée un an comme dans un monastère. Il faut rester dans la vie, sinon on se dessèche : cela m'a permis d'aborder le théâtre d'une manière plus légère que je ne le faisais auparavant.
En quoi le thème de cette nouvelle pièce vous touche-t-il ?
L'écriture de Greenberg m'a en effet touchée. Une écriture fiévreuse, diverse, avec des phrases très courtes, sonnantes. Un sujet universel sur les rapports familiaux compliqués, tissés autour de non-dits, l'histoire d'enfants devenus adultes qui parlent de leurs parents d'une certaine manière. Dans la seconde partie, on se rend compte que ces parents sont très différents. On voit ce qu'ils étaient avant la naissance de leurs enfants. Qui sont les générations précédentes, comment se construit-on par rapport à nos frères et sœurs ? C'est un peu comme un puzzle. Dans l'écriture tout est mystérieux. On fantasme toujours un peu sur ses parents : comment étaient-ils, qui étaient-ils ? Moi, je suis enfant unique et je trouve que les rapports entre frère et sœur sont, ici, très touchants, très troublants. Il y a une espèce de discorde et un amour profond, c'est très contradictoire.
Est-ce difficile de jouer les parents de son personnage ?
Peut-être qu'inconsciemment on s'inspire de ses parents. Mais moi, je raconte toujours les choses comme si je commençais une nouvelle histoire. C'est un travail d'imagination. On est proche du personnage que l'on a entre les mains, je me documente. Pour la partie qui se joue en 1960, j'ai étudié comment pouvait être une fille un peu libérée à cette époque à New York, ce qui lui était possible. Parfois cela rejoint des proches, mais surtout, le personnage que j'interprète dans la seconde partie nourrit celui de la première. La fille est forcément construite par rapport à sa mère. Parfois, on peut aussi se construire en opposition à ses parents...
Pierre Cassignard :
"C'est instinctif"
Pierre Cassignard n'a jamais joué avec Léa Drucker et Mathieu Bisson, mais il les a d'emblée classés dans les gens avec lesquels "ça colle tout de suite". C'est instinctif. Et le public, lui aussi le classe parmi les comédiens qu'il aime. C'est intuitif.
Huit jours pour s'enfiler le texte en intraveineuse et le reste, en remplacement de Jean-Pierre Bouvier et le voilà sur la scène du Palais Royal dans Devinez qui ? (Dix Petits Nègres). "Je m'amuse comme un fou. C'est vraiment un plaisir d'acteur. C'est très excitant à faire !" Il venait de jouer Oncle Vania à La Cartoucherie avec Jeanne Balibar et Jean-Paul Roussillon. "Des partenaires remarquables. Un autre bonheur ! Je répète, je tourne et je joue en même temps ! C'est chargé, mais c'est super !" En deux minutes, Pierre Cassignard transmet sa passion, sa joie, enchaîne les propos et les cigarettes en remontant une tignasse qui ne tient pas en place. Un homme heureux quoi ! "Je suis heureux comme un pinson. Si je ne travaille pas je suis triste !" Il passe d'un genre à un autre, du théâtre subventionné au théâtre privé. "Je n'ai pas d'a priori : c'est l'humain qui décide ! J'aime avoir envie des gens avec qui je travaille." Il y a eu aussi l'inoubliable On ne refait pas l'avenir aux Bouffes-Parisiens, avec Philippe Torreton : "Un cadeau entre amis !"
Remonter le temps
Cette pièce sur la filiation que représente Trois Jours de pluie lui parle, ce moment où des enfants en ouvrant le testament de leur père essaient de démêler le passé. Ce que l'on trimballe en venant au monde et que l'on découvre en cours de route. Nos parents, leurs erreurs, le pourquoi de ce que l'on est aujourd'hui... "Forcément, cela intéresse les artistes. En lisant cette pièce j'ai trouvé les trois personnages particulièrement attachants. Elle m'a fait penser à La Preuve. On remonte le temps pour comprendre qui nous sommes."
Faire du théâtre
Un enthousiasme qui n'est pas une façade, mais une manière d'être et de vivre qui guide sa carrière. "Mon personnage dans Devinez qui ? fait appel à une joie de gosse, une joie toute simple, immédiate : faire du théâtre (j'essaie de l'avoir dans tout ce que je fais). Dans Trois jours de pluie, il y a une forme, une langue, du non-dit... Ici, c'est un plaisir avec matière à débat, un Rubik's cube que le spectateur aura (j'espère !) plaisir à recomposer. Mais la joie de gosse ne sera pas loin derrière !"
Mathieu Bisson,
un coup de foudre
Il aime le théâtre vivant, contemporain ou classique, rêve de jouer "Le Misanthrope" et
"La Mouette". "Trois Jours de pluie" le propulse dans une belle distribution en haut de l'affiche, et il se réjouit de donner aux spectateurs quelque chose de nouveau chaque soir.
L'an dernier, Mathieu Bisson joue La Quatrième Sœur, de Glowacki au théâtre Silvia-Montfort, alors que Jean-Marie Besset se trouve dans la salle. Mathieu le sait, lui écrit, le rencontre, est auditionné et engagé pour jouer aux côtés de Léa Drucker et Pierre Cassignard cet automne. C'est aussi simple que cela. Comme Jean-Marie Besset, Mathieu est diplômé de l'Essec. Parti pour faire une belle carrière dans le marketing, il travaille d'abord comme chef de produit dans une grosse entreprise, profite d'un plan de licenciement pour prendre la clé des champs et bifurque vers le métier de comédien en 1998 : "Ça me semblait une évidence", assène-t-il en plantant sur vous deux yeux sombres. Il suit une formation privée, part à New York, enchaîne les stages tout en essayant de travailler ; un bon débit, comme la vitesse de ses paroles ! "J'ai réellement commencé à travailler en 2001. En quatre ans, le bilan est positif, avec aussi ses moments
d'angoisse." Si le bilan est positif, c'est que le comédien est bon et qu'il fait ses preuves.
Un sujet universel
Avec ce premier rôle important sur une belle scène parisienne, il commence fort. "Je travaille, je vis de mon métier." Puis il admet, en cédant : "C'est vrai que là c'est un super coup, une très belle opportunité." Mais au-delà de l'opportunité professionnelle, c'est un texte qu'il a tout de suite aimé. "La première lecture de la pièce a été un coup de foudre. Après l'audition, j'avais évidemment envie de jouer au théâtre de l'Atelier, mais j'avais aussi envie de jouer ce texte-là." Le fait de jouer deux personnages, le fils et le père, lui semble relever de la même difficulté qu'il y a à jouer deux pièces. "C'est écrit de manière rythmée, légère, avec brio. Il va falloir l'interpréter en étant malin ! On y parle de ces fantômes qui traversent nos existences et planent sur ce que nous sommes, nous empêchent de vivre et dont nous devons nous libérer. C'est universel."
Cinq mois de bonheur
Mathieu est entré dans les répétitions de la pièce avec un plaisir non dissimulé. "Si je ne suis pas heureux pendant ces cinq mois à venir, c'est qu'il y a un problème. Les conditions sont réunies pour que je n'aie aucune frustration. Il y aura beaucoup d'angoisse et d'inquiétude, mais je n'ai pas à me plaindre ! Les partenaires sont formidables, ils ont un vrai sens du travail. Il y a dans le métier d'acteur des moments de doute, mais ici tout est rassemblé pour que je sois au centre de la fête." Ce qui est dit est dit, et l'on a croisé un homme heureux.
"Un travail d'imagination"
Quel bilan faites-vous de votre dernière saison théâtrale ?
Je ne m'attendais pas à jouer si longtemps 84 Charing Cross Road. C'était une joie de travailler dans ce théâtre de l'Atelier et une vraie rencontre avec un public venu avec régularité. Aussi une belle expérience que de jouer cette pièce à deux personnages, sans jamais se regarder sur scène. Cela m'a permis d'explorer bien des voies et de comprendre beaucoup de choses sur ce travail. J'avais déjà fait de longues tournées, pourtant c'était la première fois que je jouais de manière continue. Mais je ne suis pas restée un an comme dans un monastère. Il faut rester dans la vie, sinon on se dessèche : cela m'a permis d'aborder le théâtre d'une manière plus légère que je ne le faisais auparavant.
En quoi le thème de cette nouvelle pièce vous touche-t-il ?
L'écriture de Greenberg m'a en effet touchée. Une écriture fiévreuse, diverse, avec des phrases très courtes, sonnantes. Un sujet universel sur les rapports familiaux compliqués, tissés autour de non-dits, l'histoire d'enfants devenus adultes qui parlent de leurs parents d'une certaine manière. Dans la seconde partie, on se rend compte que ces parents sont très différents. On voit ce qu'ils étaient avant la naissance de leurs enfants. Qui sont les générations précédentes, comment se construit-on par rapport à nos frères et sœurs ? C'est un peu comme un puzzle. Dans l'écriture tout est mystérieux. On fantasme toujours un peu sur ses parents : comment étaient-ils, qui étaient-ils ? Moi, je suis enfant unique et je trouve que les rapports entre frère et sœur sont, ici, très touchants, très troublants. Il y a une espèce de discorde et un amour profond, c'est très contradictoire.
Est-ce difficile de jouer les parents de son personnage ?
Peut-être qu'inconsciemment on s'inspire de ses parents. Mais moi, je raconte toujours les choses comme si je commençais une nouvelle histoire. C'est un travail d'imagination. On est proche du personnage que l'on a entre les mains, je me documente. Pour la partie qui se joue en 1960, j'ai étudié comment pouvait être une fille un peu libérée à cette époque à New York, ce qui lui était possible. Parfois cela rejoint des proches, mais surtout, le personnage que j'interprète dans la seconde partie nourrit celui de la première. La fille est forcément construite par rapport à sa mère. Parfois, on peut aussi se construire en opposition à ses parents...
Pierre Cassignard :
"C'est instinctif"
Pierre Cassignard n'a jamais joué avec Léa Drucker et Mathieu Bisson, mais il les a d'emblée classés dans les gens avec lesquels "ça colle tout de suite". C'est instinctif. Et le public, lui aussi le classe parmi les comédiens qu'il aime. C'est intuitif.
Huit jours pour s'enfiler le texte en intraveineuse et le reste, en remplacement de Jean-Pierre Bouvier et le voilà sur la scène du Palais Royal dans Devinez qui ? (Dix Petits Nègres). "Je m'amuse comme un fou. C'est vraiment un plaisir d'acteur. C'est très excitant à faire !" Il venait de jouer Oncle Vania à La Cartoucherie avec Jeanne Balibar et Jean-Paul Roussillon. "Des partenaires remarquables. Un autre bonheur ! Je répète, je tourne et je joue en même temps ! C'est chargé, mais c'est super !" En deux minutes, Pierre Cassignard transmet sa passion, sa joie, enchaîne les propos et les cigarettes en remontant une tignasse qui ne tient pas en place. Un homme heureux quoi ! "Je suis heureux comme un pinson. Si je ne travaille pas je suis triste !" Il passe d'un genre à un autre, du théâtre subventionné au théâtre privé. "Je n'ai pas d'a priori : c'est l'humain qui décide ! J'aime avoir envie des gens avec qui je travaille." Il y a eu aussi l'inoubliable On ne refait pas l'avenir aux Bouffes-Parisiens, avec Philippe Torreton : "Un cadeau entre amis !"
Remonter le temps
Cette pièce sur la filiation que représente Trois Jours de pluie lui parle, ce moment où des enfants en ouvrant le testament de leur père essaient de démêler le passé. Ce que l'on trimballe en venant au monde et que l'on découvre en cours de route. Nos parents, leurs erreurs, le pourquoi de ce que l'on est aujourd'hui... "Forcément, cela intéresse les artistes. En lisant cette pièce j'ai trouvé les trois personnages particulièrement attachants. Elle m'a fait penser à La Preuve. On remonte le temps pour comprendre qui nous sommes."
Faire du théâtre
Un enthousiasme qui n'est pas une façade, mais une manière d'être et de vivre qui guide sa carrière. "Mon personnage dans Devinez qui ? fait appel à une joie de gosse, une joie toute simple, immédiate : faire du théâtre (j'essaie de l'avoir dans tout ce que je fais). Dans Trois jours de pluie, il y a une forme, une langue, du non-dit... Ici, c'est un plaisir avec matière à débat, un Rubik's cube que le spectateur aura (j'espère !) plaisir à recomposer. Mais la joie de gosse ne sera pas loin derrière !"
Mathieu Bisson,
un coup de foudre
Il aime le théâtre vivant, contemporain ou classique, rêve de jouer "Le Misanthrope" et
"La Mouette". "Trois Jours de pluie" le propulse dans une belle distribution en haut de l'affiche, et il se réjouit de donner aux spectateurs quelque chose de nouveau chaque soir.
L'an dernier, Mathieu Bisson joue La Quatrième Sœur, de Glowacki au théâtre Silvia-Montfort, alors que Jean-Marie Besset se trouve dans la salle. Mathieu le sait, lui écrit, le rencontre, est auditionné et engagé pour jouer aux côtés de Léa Drucker et Pierre Cassignard cet automne. C'est aussi simple que cela. Comme Jean-Marie Besset, Mathieu est diplômé de l'Essec. Parti pour faire une belle carrière dans le marketing, il travaille d'abord comme chef de produit dans une grosse entreprise, profite d'un plan de licenciement pour prendre la clé des champs et bifurque vers le métier de comédien en 1998 : "Ça me semblait une évidence", assène-t-il en plantant sur vous deux yeux sombres. Il suit une formation privée, part à New York, enchaîne les stages tout en essayant de travailler ; un bon débit, comme la vitesse de ses paroles ! "J'ai réellement commencé à travailler en 2001. En quatre ans, le bilan est positif, avec aussi ses moments
d'angoisse." Si le bilan est positif, c'est que le comédien est bon et qu'il fait ses preuves.
Un sujet universel
Avec ce premier rôle important sur une belle scène parisienne, il commence fort. "Je travaille, je vis de mon métier." Puis il admet, en cédant : "C'est vrai que là c'est un super coup, une très belle opportunité." Mais au-delà de l'opportunité professionnelle, c'est un texte qu'il a tout de suite aimé. "La première lecture de la pièce a été un coup de foudre. Après l'audition, j'avais évidemment envie de jouer au théâtre de l'Atelier, mais j'avais aussi envie de jouer ce texte-là." Le fait de jouer deux personnages, le fils et le père, lui semble relever de la même difficulté qu'il y a à jouer deux pièces. "C'est écrit de manière rythmée, légère, avec brio. Il va falloir l'interpréter en étant malin ! On y parle de ces fantômes qui traversent nos existences et planent sur ce que nous sommes, nous empêchent de vivre et dont nous devons nous libérer. C'est universel."
Cinq mois de bonheur
Mathieu est entré dans les répétitions de la pièce avec un plaisir non dissimulé. "Si je ne suis pas heureux pendant ces cinq mois à venir, c'est qu'il y a un problème. Les conditions sont réunies pour que je n'aie aucune frustration. Il y aura beaucoup d'angoisse et d'inquiétude, mais je n'ai pas à me plaindre ! Les partenaires sont formidables, ils ont un vrai sens du travail. Il y a dans le métier d'acteur des moments de doute, mais ici tout est rassemblé pour que je sois au centre de la fête." Ce qui est dit est dit, et l'on a croisé un homme heureux.
Paru le 08/11/2004
TROIS JOURS DE PLUIE THÉÂTRE DE L'ATELIER Du mardi 31 août 2004 au samedi 1 janvier 2005
COMÉDIE DRAMATIQUE. Walker et Nan, frère et sœur, se retrouvent pour l’ouverture du testament de leur père, Edmund, un architecte célèbre. Présent aussi, Phil, leur ami d’enfance, dont le père était l’associé d’Edmund. Or le partage de l’héritage n’est pas celui qu'on attendait. Une surprise qui prend sa source dans ...
|