À Paris, Anne Bourgeois a deux spectacles à l'affiche du Théâtre de Passy. D'abord «Mademoiselle Chanel en hiver » qui se déroule en 1946, quand la grande couturière doit quitter la France le temps que l'on fasse la lumière sur ses activités pendant la collaboration. Elle trouve refuge dans un palace en Suisse où elle est partie avec l'écrivain Paul Morand, l'un de ses amis, censé écrire les mémoires de la modiste. Dans cette pièce de Thierry Lasalle, on assiste à leurs rendez-vous qui se transforment en joutes oratoires. Tout à l'opposé de « Chanel », la fiction « Irrésistible Offenbach » permet de découvrir une pièce de troupe signée Bruno Duart et Patrick Angonin, qui virevolte en musique autour d'Offenbach, chef de troupe très amoureux de la cantatrice Hortense Schneider.

Avec Warren Zavatta dans « Sortie de piste » au Lucernaire, c'est encore différent. « Warren est un ami dans la vie et j'avais fait avec lui son premier spectacle, « Ce soir dans votre ville ». J'ai vécu avec lui sa descente aux enfers, en restant toujours à ses côtés. Quand il m'a dit qu'il voulait raconter cette période sur scène, j'ai fait un peu office de collaboratrice artistique, au-delà de mon rôle de metteur en scène ». Et si on l'interroge sur sa douceur dans le travail qui est une de ses caractéristiques, elle répond : « Je fais ce boulot parce que je voudrais que le public s'aperçoive à quel point ceux qui sont sur scène peuvent rendre le moment agréable et rare ! Étant metteur en scène, je ne veux pas les éteindre, les détruire ou les manipuler. J'ai besoin d'eux et, bien sûr, il y a de ma part de la douceur, de la tendresse et du respect, mais peut-être qu'au final,ils sont encore plus dirigés que si on leur parle mal et si on les brutalise ! Toujours est-il qu'il vaut mieux ne pas avoir un ego surdimensionné et savoir les écouter, après tout, ce sont eux qui sont sur scène et qui jouent !».

Pour Anne Bourgeois, au-delà de la technique de travail et des rapports avec les comédiens, il est essentiel que l'on soit d'accord sur l'histoire que l'on veut raconter au public. Transmettre des informations et des émotions pour « Chanel », apporter un sentiment d'euphorie avec « Offenbach » et pour Warren Zavatta, une réflexion pouvant ramener le public à des choses émouvantes, vécues, de près ou de loin. En ayant en ligne de mire le spectateur et ce qu'on lui laisse en émotions et en souvenirs quand le rideau est retombé.

Avignon 2023 verra en juillet la reprise de « Sur le fil », une belle comédie romantique de Sophie Forte, créée il y a 17 ans sur la difficulté à accepter nos différences. « À l'époque, j'étais très proche du comédien Philippe Sivy qui est en fauteuil roulant et c'était évident que cette pièce était pour lui. » Depuis, Atelier Théâtre Actuel en a été le tourneur et Thibaud Houdinière a souhaité la reprendre en l'actualisant. « Sophie a rajouté des années à ses personnages » précise Anne Bourgeois qui sera donc présente au Festival d'Avignon avec un beau doublé : « Sur le fil » au Roi René et « Sortie de piste » au Théâtre Buffon.