Valérie, c'est vous qui, après avoir sculpté des calamars géants avez eu l'idée de cette adaptation ?
Valérie Lesort : Oui, plasticienne, j'avais fabriqué des animaux marins géants pour l'ONG Bloom. Nous voulions monter un spectacle permettant de faire vivre des marionnettes (créées ensuite en collaboration avec Carole Allemand) et nous avons proposé l'adaptation du roman de Jules Verne à Éric Ruf, administrateur général de la Comédie Française.

Votre attrait pour le travail des marionnettes, si précieux (il nous épargne les vidéos !), vient de votre participation, à des moments différents, à la compagnie Philippe Genty !
Christian Hecq: J'étais dans la compagnie de Philippe Genty avant de rentrer à la Comédie Française. C'est lui qui m'a injecté le virus de la marionnette.
V.L. Chez moi, cela remonte loin, j'ai travaillé pour « Les Guignols de l'info » mais aussi dans plusieurs ateliers aux studios de cinéma de Shepperton près de Londres. J'ai aussi conçu 120 monstres marins marionnettiques pour l'Exposition universelle 1998 de Lisbonne. Ce travail a naturellement servi à mon activité de comédienne.

L'un de vos objectifs était d'introduire une dimension théâtrale et de l'humour à « 20 000 lieues sous les mers » !
C.H. On a recolorisé les personnages pour leur donner plus de consistance, comme c'est le cas, par exemple, pour le second du capitaine Nemo. On a aussi développé cette idée d'un langage commun pour communiquer avec un équipage venant des quatre coins du monde.
V.L. Les personnages étant enfermés, il n'y a pas vraiment de dramaturgie, le roman est surtout un prétexte à la science. Il a fallu recréer une ambiance mais aussi des personnages comme le sauvage qui incarne le monde extérieur.
C.H. On a un décor unique comme dit Valérie, on ne peut pas sortir du sous-marin. Par contre, on peut être complètement dans le noir, ce qui permet de faire vivre les marionnettes et de recréer le milieu aquatique.

Au moment où vous avez préparé le spectacle, ne vous êtes vous jamais dit que cette idée était folle ?
C.H et V. L. Si et nous avons eu vraiment peur de présenter cette folie à la Comédie Française, c'était assez vertigineux. Mais c'est une belle histoire. Elle a pu exister grâce à toux ceux qui ont collaboré au spectacle.

Chacun sait aujourd'hui que votre travail, très abouti, est mis au service du divertissement. Vous avez toujours dit que vous ne vouliez pas que le public s'ennuie. Est-ce là l'un de secrets de votre réussite ?
V.L. oui, le dénominateur commun, évident quand on voit jouer Christian, c'est d'insuffler à ce travail (le jeu et la scénographie) une part d'enfance.
C.H. Valérie a dit un jour que nos spectacles avaient tendance à faire retourner les adultes en enfance tout en faisant grandir les enfants. Ceci dit, nous ne faisons pas des spectacles pour enfants, mais pour tout public !
V.L Nous faisons des spectacles sans référence, où il est nul besoin d'avoir une connaissance en particulier pour comprendre, on parle de l'humain de manière universelle, en étant simple. Ce qui demande beaucoup de travail, rester simple n'est jamais facile !