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D.R.
Portrait par Philippe Escalier
Tristan Robin

Ce trentenaire que l'on peut voir actuellement au Théâtre de l'Œuvre dans « Smile », la pièce deux fois nommée aux Molières de Nicolas Nebot et Dan Menasche, a prouvé qu'il excellait dans de nombreux domaines. Nous revenons sur un parcours dont la richesse ne manque pas d'étonner et qui préfigure de belles choses à venir.
Tout commence pour lui par une formation en 2004 dans sa région d'origine au Studio Théâtre de Nantes, dirigé à l'époque par Jacques Guillou. À la question de savoir s'il a toujours voulu devenir comédien, l'on s'attendrait bien sûr à une réponse affirmative. Pas si sûr ! Car après cette première formation, Tristan Robin échoue de peu à une autre grande école de théâtre et s'entend dire « qu'il n'est pas assez construit humainement ! ». Son orgueil en prend un coup, la moutarde lui monte au nez, il décide de tout abandonner et de devenir maréchal ferrant. Au début tout va bien mais cela se complique rapidement : n'avoir jamais côtoyé les chevaux rend le contact avec ces animaux un peu difficile. Il frôle un jour la catastrophe : d'un coup de sabot, un cheval défonce un mur et manque de peu de lui percuter le crâne. Cette brave bête un peu soupe au lait lui donne aussitôt l'envie de mettre les voiles et de retourner au théâtre pour y affronter les metteurs en scène les plus exigeants !

Retour au théâtre

Très vite il décroche le rôle titre dans « Roméo et Juliette » mis en scène par Georges Richardeau au Théâtre Universitaire de Nantes (le T.U.) avant de participer à l'aventure « Cabaret » aux Folies Bergère. Il fait partie des barmen du Kit Kat Club que l'on a reconstitué pour immerger les spectateurs dans l'ambiance du spectacle et donc du Berlin des années 30. Il assiste à toutes les représentations, un peu frustré néanmoins de ne pas être sur scène. Un soir, il rencontre Jacques Collard l'adaptateur du show qui lui dit tout de go « Vous n'êtes pas serveur, vous êtes comédien n'est ce pas ? ». L'homme du tout Paris, qui est avant tout un homme de spectacle bienveillant, lui ouvre de nouvelles perspectives et il n'en faut pas plus pour remettre Tristan Robin en selle et lui donner le désir de terminer sa formation. Belle revanche, il réussit le concours et intègre le TNBA de Bordeaux entre 2007 et 2011, moment où il reçoit un appel de Jacques Collard lui annonçant que « Cabaret » de Sam Mendes se remonte au Théâtre Marigny et lui conseillant de venir participer aux auditions. Il suit le conseil et le voilà en charge du rôle de Bobby que jouait Dan Menasche dans la version précédente, Dan avec qui Tristan alterne actuellement dans « Smile ». Dans la foulée, il sera recruté pour « Les Amants d'un jour » qui ne se monteront pas suite au scandale provoqué par le départ de la productrice avec la caisse. Les artistes, certains de jouer, ayant refusé toutes autres propositions, subissent la double peine : spectacle annulé et une année blanche à venir.

Londres, nous voilà !

C'est le moment que choisit Tristan Robin pour partir à Londres où il passe quatre années. À son arrivée, s'il est sans travail, il connait pourtant quelques bons moments comme quand il décide de prendre sa guitare, de se poser et de jouer dans une rue passante, « avec une peur de fou ! ». Il confie : « Les piétons s'arrêtaient et j'ai touché du doigt la magie de ce métier, il n'est nul besoin d'avoir une scène, de vendre des places, il suffit d'être là et d'avoir envie de partager ». Plus tard, les contacts venant, Tristan Robin alternera comme il l'a toujours fait, théâtre, comédie musicale et séries télé. L'un de ses meilleurs souvenirs reste la pièce « In the dead of night » un hommage au film noir dans une mise en scène chorégraphiée de l'auteur, Claudio Macor.

À Paris, sur scène

En 2016, un coup de fil le fait revenir à Paris. Dominique Pitoiset, l'ancien directeur du TNBA lui propose de participer à la reprise de « Cyrano de Bergerac » avec Philippe Torreton à la Porte Saint-Martin pour six mois. Cette belle expérience sera suivie d'une pièce écrite et mise en scène par Mathilda May « Le Banquet » jouée sur deux ans, au Rond-Point d'abord puis au Théâtre de Paris avec deux tournées et 2 Molières à la clé. Dans le même temps, le comédien jouera dans « 2 mensonges & 1 vérité » mis en scène par Jean-Luc Moreau. Dans tous ses rôles, on découvre une belle présence, une étonnante facilité à incarner, à donner vie à des personnages et ce, toujours avec une grande justesse : « Je me sens très à l'aise dans le théâtre physique, j'ai fait des arts martiaux et cette implication du corps me parle beaucoup » précise-t-il. La richesse de ses interprétations qui relève du don est aussi le fruit d'une grande curiosité doublée d'une volonté de continuer sans cesse à perfectionner ses techniques, qu'elles soient vocales ou corporelles, bien certain que, comme il le dit, « s'améliorer est une quête sans fin ».

Dans le domaine musical, il bénéficie d'une véritable antériorité familiale son arrière grand-père étant professeur de violon. Son père, très mélomane, amateur de jazz, demandait à ses enfants, de choisir à 6 ans, un instrument et un sport. Pour lui, ce sera le violon et le judo. Ses deux frères, John et Max, profiteront pleinement de leur formation et trouveront le succès en 2008 en fondant le groupe pop rock electro, « Elephanz ».

Devant la caméra

L'on peut voir Tristan Robin un peu sur tous les fronts : dans des pubs, véritables laboratoires pour réalisateurs qui produisent parfois de très bonnes surprises en faisant preuve d'une d'inventivité remarquable, à la télé dans de nombreuses séries. Il a pu incarner récemment Louis XIV dans « La Guerre des trônes » de Bruno Solo. L'on pourrait citer aussi « Cannes Confidential » de Camille Delamarre, « Les Petits meurtres d'Agatha Christie », les séries britanniques « Transporteur » et « Agent Hamilton ».
Les réalisateurs l'ont remarqué et le font travailler comme Luc Besson dans son « Valerian and the City of a Thousand Planets » où il joue en anglais. Il est actuellement à l'affiche du film de Robin Sykes « Sexygénaires » avec Thierry Lhermitte et Patrick Timsit où il incarne le fils de Marie Bunel. Pour lui, l'aventure cinématographique a commencé avec Volker Schlöndorff qui tournait à Nantes. Pendant qu'il donnait la réplique en allemand, il est repéré par le grand cinéaste qui le fait jouer dans « Diplomatie » mais aussi dans son téléfilm « La Mer à l'aube ».

Pour conclure...

Sur un plan plus personnel, c'est en allant voir jouer Claire Pérot, une collègue de travail, qu'il rencontre en 2018, Cécilia Cara avec laquelle il partage un véritable coup de foudre. Cécilia fait actuellement une brillante tournée de quatre mois en Chine avec « Roméo et Juliette » dans le rôle titre qu'elle a créé en 1999. Une absence rendue moins pesante par la participation de Tristan Robin à « Smile » au Théâtre de l'Œuvre où il convient d'aller le découvrir jusque fin juillet, non sans s'amuser du titre de cette pièce qui colle si bien à ce comédien doué, connu pour avoir un irrésistible sourire !
Paru le 26/06/2023