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D.R.
Article de Philippe Escalier
Alexis Moncorgé
flamboyant dans « Eldorado 1528 »

Le Festival d'Avignon 2023 a permis de découvrir « Eldorado 1528 », le premier texte signé Alexis Moncorgé qui en donne une brillante interprétation. Ce récit flamboyant, humaniste, pose sur les amérindiens un autre regard, plus lucide et plus juste. Avant de le revoir en septembre au Petit Montparnasse, nous avons interrogé son auteur.
Alexis, comment le thème si particulier de votre spectacle s'est-il imposé à vous ?
Je suis passionné par la collision entre les continents européen et américain qui a été le début de beaucoup de choses et notamment du capitalisme. Je suis passionné d'Histoire et dans le fourmillement de destins à l'époque des conquistadors, je suis tombé sur Alvar Nuñez Cabeza de Vaca au moment où j'avais envie de parler d'altérité et d'humanité pour échapper au fait que l'on vive de plus en plus reclus sur soi. Mon précédent spectacle était «Amok* » de Stefan Zweig, qui était un grand humaniste. Je suis resté dans cette veine là et je voulais montrer comment le plus beau des trésors n'est pas celui dont on veut s'emparer mais bien celui que l'on possède au fond de soi. Je voulais vraiment faire un spectacle qui soit une main tendue vers l'Autre !

Et vous avez choisi ce personnage qui a tout d'une figure de roman mais qui a bel et bien existé !
Oui, mais au delà du personnage qu'il est, ce qui m'intéressait, c'était le symbole d'un perdant magnifique, un conquistador dépouillé de tout suite à un naufrage. Il n'a alors plus d'autre choix que de tendre la main aux Indiens qui l'entourent tout en découvrant sa véritable personnalité. Mais à contre courant de son époque, ce marcheur sans but, qui finit par revenir en Espagne, ne pouvait être entendu par ses contemporains, l'Histoire n'étant écrite que par les vainqueurs en lettres de sang !

Quels sont les styles littéraires dont vous vous sentez proche ?
Je suis un lecteur de la littérature de l'évasion et du voyage, très attiré par Sylvain Tesson ou Nicolas Bouvier. Si l'on remonte plus loin, je citerai Joseph Conrad, Robert Stevenson, ce qui ne m'empêche pas de lire et de m'intéresser par ailleurs à des auteurs et à des sujets très différents.

En voyant « Eldorado 1528 », l'on comprend que rien n'a été laissé au hasard. Comment préparez-vous vos spectacles ?
Je produis mes spectacles donc je choisis mes équipes artistiques et je détermine la direction dans laquelle je souhaite aller. Après, nous sommes dans un climat de confiance, je laisse une liberté totale à mes collaborateurs artistiques. Je partage avec ma metteuse en scène, Caroline Darnay, l'idée que l'on ne dirige pas un acteur, on lui montre un point d'horizon vers lequel il peut aller.

La mise en scène justement est assez picturale !
Oui, j'aime beaucoup le cinéma. Le spectacle et mon écriture sont marqués par certains réalisateurs : Werner Herzog avec « Aguire, la colère de Dieu » ou « Fitzcarraldo » ou même Lucas, Spielberg ou James Gray quand il fait « The Lost City of Z », j'assume totalement cela. Je voulais du souffle et de l'épique et j'ai fait appel à un compositeur qui savait travailler l'orchestration. Mon créateur lumière arrive très bien à saisir les ambiances que je veux. Au-delà du message humaniste, je tenais vraiment à embarquer le spectateur dans une aventure mémorable.

« Amok » lui permet de recevoir en 2016 le Molière de la Révélation Théâtrale

Paru le 05/09/2023

(151 notes)
ELDORADO 1528
LE PETIT MONTPARNASSE
Du jeudi 7 septembre au dimanche 31 décembre 2023

SEUL-E EN SCÈNE. Au printemps 1528, Alvar Nuñez Cabeza de Vaca est un conquistador parmi d’autres qui s’apprête à débarquer en Floride, pour y trouver la mythique cité d’Eldorado. L’expédition est un fiasco et se termine par un naufrage. Huit ans plus tard, Alvar réapparaît de l’autre côté du continent, au Mexique...