Plaçons-nous dans un monde futuriste, dans lequel serait arrivé au pouvoir un gouvernement très patriarcal et autoritaire, ayant renvoyé les femmes dans leur foyer. Dans cet univers, des femmes sont entrées en résistance. Ces personnages, si ce sont des femmes fortes et résistantes, peuvent être aussi peu efficaces, maladroites, parfois indéfendables. Elles sont humaines et bourrées de défauts. Ainsi pourrait-on résumer rapidement la pièce de Céline Fuhrer et Jean-Luc Vincent qui, avec l'arme redoutable du rire, ont voulu contribuer au combat féministe, d'une actualité perpétuelle, plus encore depuis une dizaine d'années où les droits des femmes sont remis en cause. Ils précisent : "L'humour est notre langage. Il est efficace et n'est pas que moqueur, il peut être porteur de sens et ouvrir à la réflexion. Il permet plus facilement d'aller dans la contradiction, de remettre en question en sortant parfois de la nuance, même si l'écriture, les situations, les personnages viennent toujours rétablir une forme d'équilibre."

La pièce ne comportant que des femmes, les auteurs ont choisi de faire jouer aux deux acteurs des personnages féminins. Une façon de mettre la question du genre sur le plateau avec en prime, le goût du jeu : le travestissement, c'est le théâtre ! "Faire jouer les problématiques de la femme par un homme sur le plateau, cela résonne différemment" dit Céline Fuhrer tout en rajoutant : "On connait Cédric Moreau depuis longtemps, nous avons fait ensemble du théâtre de rue, ce qui a créé entre nous une grande complicité. J'ai rencontré Valérie Karsenti sur "Scènes de ménage". Nous avons parlé de féminisme, sujet sur lequel elle a beaucoup à dire. Elle est venue nous voir jouer au Montfort et a été touchée par la liberté des acteurs qui caractérise nos spectacles. C'est une excellente actrice qui vient d'un univers différent du nôtre, ce qui nous enrichit réciproquement".

Les deux auteurs-interprètes étant aussi metteurs en scène, une caméra vient faire office de troisième œil : "On se filme et l'on se regarde, sans concession. La caméra nous aide énormément. En outre, dès que c'est possible, l'on s'extrait du plateau, ce qui demande une certaine gymnastique. Par ailleurs, avec Isabelle Fuchs, François-Gauthier Lafaye, Elisabeth Cerqueira, Ludovic Bouaud, Flavien Renaudon, Jessica Maneveau et Christophe Rodomisto, nous avons autour de nous une belle équipe efficace et autonome. Ils nous font des retours auxquels nous sommes très attentifs".

À la question "Qu'aimeriez-vous entendre dire par les spectateurs sortant de votre spectacle ?", Céline Fuhrer et Jean-Luc Vincent répondent d'une même voix : "Ça m'a fait du bien !". Et rajoutent : "C'est très large, cela veut dire ça nous a fait du bien d'entendre ce texte, mais aussi de rire. Dans notre monde anxiogène, il y a besoin que le théâtre soit une forme de divertissement au sens noble du terme. Il ne faut pas que ce soit un endroit de dureté et d'esprit de sérieux, deux choses qui sont loin d'être la caution d'une pensée intelligente !"