Tout commence en janvier avec « 40º sous zéro », une forme représentative de leur travail sur les masques, construite autour d'un diptyque de Copi, avec l'ensemble de la troupe et des costumes signés Christian Lacroix. « Objet théâtral par excellence, le masque est pour nous un outil dramaturgique central, qui questionne notre rapport à l'identité, au sacré, à la mort. Les masques que nous fabriquons créent des « figures » étranges qui nous relient à notre humanité profonde et nous troublent par leur cruauté, leur fragilité, leur naïveté. La réalité se déforme subtilement et l'émotion se fait picturale. » nous dit Louis Arene.
Suivra en février « Le Mariage forcé », commande de la Comédie Française passée en 2022. Pour eux, c'est une première avec un texte classique. « Avec notre force esthétique, l'engagement des comédiens, les lignes de tensions de la pièce sont dynamisées et actualisées, notamment par l'inversion des rôles : Christian Hecq joue la jeune première et Julie Sicard interprète Sganarelle. Un procédé comique très efficace en même temps qu'il révèle les dysfonctionnements et les inégalités de genre, évidemment présents à l'époque de Molière, et qui sont malheureusement toujours actuels » confie Lionel Lingesler.

Ce mini-festival se terminera en mai et juin avec « Les Possédés d'Illfurth », un texte commandé à Yann Verburgh, joué par Lionel Lingelser dans lequel on retrouve la pureté et la créativité de l'acte théâtral. Partant de l'intime pour aller vers l'universel, le comédien interprète plusieurs personnages, ravissant l'imaginaire des spectateurs, un peu à la Philippe Caubère. Un acteur dont la folie de l'œuvre et la joie qu'il a suscité ont guidé les deux artistes. Parmi leurs autres grandes sources d'inspiration, ils citent Romeo Castellucci avec sa manière de questionner l'art théâtral et la place du spectateur, tout en jouant avec les codes. Sur le plan littéraire, Beckett et Kafka ont été pour eux des chocs esthétiques qui les ont beaucoup nourris comme la peinture de Francis Bacon. Le cinéma aussi, les a influencés avec notamment David Lynch, un créateur qui interroge la dramaturgie et qui rend le spectateur actif.

Pour finir, comment ne pas partager leur vision passionnée de leur métier : « Nous faisons un travail méticuleux et organique sur le sens et la langue, qui se combine à une recherche visuelle et plastique ambitieuse. Les images et les corps produisent une dramaturgie sensorielle et émotionnelle. La sculpture, la peinture, la musique, la danse s'entrechoquent dans des spectacles polymorphes ou mauvais et bon goût n'ont plus de sens.

C'est l'énergie que nous développons en scène mais aussi le jeu avec les différents genres qui fédèrent autour de notre travail un public jeune et engagé. Un public qui a soif d'histoires, de rêve, de poésie et qui recherche dans la représentation théâtrale un rapport au réel autre que celui que nous imposent la culture de masse, les médias ou les réseaux sociaux. Nous souhaitons faire de la représentation une expérience extraordinaire, un moment de communion qui permettrait d'élever nos forces de vie, d'entretenir la flamme de la joie. »