Zoom par Philippe Escalier
Le jeu de l’amour et du hasard
Au Lucernaire
Dans cette pièce, l'un des chefs d'œuvre de Marivaux, l'auteur se livre, comme à son habitude, à une fine description des relations sociales et affectives. La mise en scène, très subtile, permet de savourer avec plus d'intensité encore ce moment jubilatoire porté par une belle troupe.
Le XVIIIe siècle a porté, en particulier grâce à Marivaux, la langue française à des sommets. La préciosité de ses textes est toujours tempérée par la justesse de ses observations et l'humour qui les accompagne. Cette langue si classique n'en demeure pas moins parfaitement limpide et d'une éclatante modernité, on en veut pour preuve le quasi féminisme dont il se fait l'avocat. Chez Marivaux, la femme a redressé la tête et elle décide. Dans « Le jeu de l'amour et du Hasard », c'est justement pour arrêter son choix en toute connaissance de cause que Silvia entreprend de permuter les rôles avec sa servante dans le but de se déterminer face au bon parti proposé par son père. Ce subterfuge devient d'autant plus piquant que le promis, sans rien savoir, a fait de même avec son serviteur. Tout est en place pour que les véritables personnalités apparaissent, sans fard, au grand jour au prix d'un véritable désordre amoureux et d'une situation toute chamboulée qui vire au dérapage incontrôlé.
La mise en scène élaborée et joyeusement délirante de Frédéric Charboeuf, dans sa dualité classique-moderne est du plus bel effet. Les habits de cour ont été oubliés pour faire place à des tenues de prolétaires. Ces décalages qui s'accompagnent de multiples trouvailles et d'un jeu d'acteur sans faille, font ressortir les merveilles du texte délicatement soulignés par quelques virgules musicales hétéroclites, mêlant Rameau, Wagner et Grease (avec « You're the one that I want »). Les surprises s'enchainent et les deux personnages principaux vont devoir ramer dur pour sortir du piège dans lequel ils se sont fourrés. Respect des convenances, impossibilité de se mésallier, qui du statut social encore prégnant ou de l'amour va l'emporter ? Le simple fait de poser la question caractérise le fossé séparant le XVIIe du XVIIIe siècle qui marche allégrement vers les Lumières. Et Marivaux de continuer à nous faire rire et à nous étonner en décrivant ce cheminement vers le progrès et l'émancipation. Les longs applaudissements que le public réserve au jeu d'Adib Cheiki, Matthieu Gambier, Jérémie Guilain, Lucie Jehel, Frédéric Charboeuf, Dennis Mader et Justine Teulié (en alternance avec Camille Blouet), ces véritables preuves d'amour ne doivent donc rien au hasard !
La mise en scène élaborée et joyeusement délirante de Frédéric Charboeuf, dans sa dualité classique-moderne est du plus bel effet. Les habits de cour ont été oubliés pour faire place à des tenues de prolétaires. Ces décalages qui s'accompagnent de multiples trouvailles et d'un jeu d'acteur sans faille, font ressortir les merveilles du texte délicatement soulignés par quelques virgules musicales hétéroclites, mêlant Rameau, Wagner et Grease (avec « You're the one that I want »). Les surprises s'enchainent et les deux personnages principaux vont devoir ramer dur pour sortir du piège dans lequel ils se sont fourrés. Respect des convenances, impossibilité de se mésallier, qui du statut social encore prégnant ou de l'amour va l'emporter ? Le simple fait de poser la question caractérise le fossé séparant le XVIIe du XVIIIe siècle qui marche allégrement vers les Lumières. Et Marivaux de continuer à nous faire rire et à nous étonner en décrivant ce cheminement vers le progrès et l'émancipation. Les longs applaudissements que le public réserve au jeu d'Adib Cheiki, Matthieu Gambier, Jérémie Guilain, Lucie Jehel, Frédéric Charboeuf, Dennis Mader et Justine Teulié (en alternance avec Camille Blouet), ces véritables preuves d'amour ne doivent donc rien au hasard !
Paru le 13/03/2024
(22 notes) THÉÂTRE DU LUCERNAIRE Du mercredi 24 janvier au dimanche 2 juin 2024
COMÉDIE RÉPERTOIRE CLASSIQUE à partir de 8 ans. Pour sonder la sincérité de Dorante, qu’on lui destine sans l’avoir jamais rencontré, Silvia échange son habit avec sa servante Lisette. Ce qu’elle ignore, c’est que son prétendant a recours au même stratagème avec son valet Arlequin. Ainsi travestis, les deux couples seront donc les dupes de ce j...
|