Le soleil est en berne mais le théâtre rayonne toujours à la MC93. À son habitude, elle nous fait oublier le grand espace vide du ciel avec les cérémonies considérables de notre présent.
"Moi, Jean-Noël Moulin..." sonne le glas d'un monde où le chaos règne sans partage. Les forêts brûlent, l'air est irrespirable. Une langue luxuriante pour conter ce monde aride et dévasté en perte de sens.
Des projections en noir et blanc donnent contour aux symptômes du désordre, le grain de la projection met en valeur la densité des éléments, la chair de l'air, le brillant de l'eau, la clarté de la forêt. Il y avait tant de choses vivantes dans le temps d'autrefois. Le grand rêve d'une vie sans limites, où chaque chose avait sa place sur terre. L'angoisse de la chute est réelle, les mots dégringolent dans les ténèbres d'une nuit infinie. On est à ce point précis du temps circulaire où la fin de l'univers rejoint la nuit primordiale. Et soudain, cette lueur d'espoir. Jean-Noël Moulin décide de prendre les choses en main, de s'auto-proclamer président à la place du président défunt et de nommer son chien chef du gouvernement. C'est peu de chose mais ce n'est pas rien.
"Fais ce que tu crois juste en ce monde et fais-le bien. Tant qu'il te reste un peu de vie, fais-en sorte que ce peu devienne la chose la plus importante du monde."
"Il faudra mourir pour vivre encore." Renoncer à une part de ce nous sommes pour que la vie puisse revenir.
Un spectacle bouleversant de luminosité.

Patrick Pineau campe avec talent cet ermite du fond des bois qui n'est pas sans nous faire penser à un SDF, qui se retrouve avec la valise du Président de la république suite à un crach aérien et endosse pour un instant la fonction, et ce avec ses mots et son chien. Le final est magistral et le jeu de lumières et des musiques grandiose.