Zoom par Manuel Piolat Soleymat
Marcel Proust, à la recherche du temps perdu
à la Comédie des Champs-Élysées
Xavier Gallais(1), Bernadette Lafont et Robin Renucci se retrouvent sur la scène de la Comédie des Champs-Élysées pour une lecture d'instants choisis d'"À la recherche du temps perdu" de Marcel Proust. Se passant puis reprenant à tour de rôle la parole, chacun des trois comédiens teinte de sa couleur personnelle les pans du monument littéraire qu'il donne à entendre au public.
Deux tables, deux lampes, une ambiance intime, minimaliste : le rendez-vous auquel nous convient Xavier Gallais, Bernadette Lafont et Robin Renucci n'a rien d'un grand spectacle déployant de riches costumes, une imposante scénographie. Il s'agit d'une simple lecture, qui souhaite laisser une place prépondérante à l'imagination et à la beauté de l'écriture. Une lecture à trois voix qui se propose de parcourir quelques-unes des milliers de pages composant À la recherche du temps perdu - le roman en sept tomes écrit par Marcel Proust de 1908 à 1922. Piochant çà et là au sein de ce monument de la littérature mondiale, les trois comédiens font ainsi circuler entre eux la parole pour composer une forme de flânerie à travers les souvenirs du célèbre narrateur. Une flânerie qui, bien sûr, convoque la compagnie de cet être introspectif, mais également celle des principaux personnages qui occupent sa mémoire : Françoise, Charles et Odette Swann, Madame Verdurin, le baron de Charlus, la duchesse de Guermantes, Albertine... Ce sont donc de multiples éclats du texte que cette lecture vise à présenter, cela afin de permettre au public de (re)découvrir toutes les tonalités du style, de l'humour, de la tendresse de Marcel Proust, toute la saveur de la critique sociale à laquelle il se livre.
"La portée politique de la lecture"
"Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n'avais pas le temps de me dire : 'Je m'endors.'" Ces tout premiers mots d'À la recherche du temps perdu, c'est Robin Renucci qui les prononce. Et si le comédien s'assoit aujourd'hui sur la scène de la Comédie des Champs-Élysées, ce n'est pas seulement par amour des belles lettres, mais aussi parce qu'il s'est depuis longtemps engagé en faveur de la lecture publique, notamment à travers la création de l'A.R.I.A.(2). "Pour moi, affirme Robin Renucci, il existe une portée politique à la lecture. Ce genre d'exercice permet en effet un échange beaucoup plus ambitieux et profond avec le public que la représentation de théâtre traditionnelle. Car, lors d'une lecture, le spectateur n'est pas du tout placé dans la position d'un client ou d'un consommateur. Son imaginaire est sans arrêt sollicité, ce qui fait de lui un partenaire actif, un créateur à part entière." Issu d'un milieu social au sein duquel les livres n'avaient que peu de place, c'est en écoutant certains de ses enseignants lire des textes que le comédien en est venu à s'intéresser aux mots, puis au théâtre. À son tour, il souhaite aujourd'hui pouvoir transmettre, à travers la lecture, ce goût pour la littérature, le beau et l'imaginaire.
Les gammes d'un comédien
Pour Xavier Gallais, la lecture à voix haute est également une activité très particulière. Il s'agit en effet d'un exercice qu'il réalise chaque jour, chez lui, un travail qui prend part à son entraînement de comédien. "C'est comme un pianiste qui fait ses gammes, explique-t-il. Lire Proust en public revient à proposer à des spectateurs d'assister à ce travail-là. On n'est pas dans un acte de reproduction, de représentation, mais dans un acte intime de création en temps réel. Car, lorsque l'on lit un texte à haute voix, tout est encore très mouvant : le rapport charnel aux mots, à la ponctuation... Ainsi, il faut parvenir à recréer les images du texte au moment même où elles jaillissent à l'intérieur de soi. C'est un exercice qui me plaît beaucoup, pour lequel il faut savoir rester sans cesse en mouvement." S'attachant à explorer le monde de Marcel Proust à travers la plus grande authenticité et la plus grande fluidité, Xavier Gallais et ses deux partenaires de scène cherchent à plonger le public au plus profond de cette matière littéraire. Une matière qui dévoile, bien sûr, une grande finesse stylistique et psychologique, mais qui révèle également un sens du comique parfois méconnu.
(1) Xavier Gallais est également à l'affiche de Baby Doll de Tennessee Williams (aux côtés de Mélanie Thierry, Monique Chaumette, Théo Légitimus et Chick Ortega), dans une mise en scène de Benoît Lavigne, au Théâtre de l'Atelier.
(2) L'Association des Rencontres Internationales Artistiques.
"La portée politique de la lecture"
"Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n'avais pas le temps de me dire : 'Je m'endors.'" Ces tout premiers mots d'À la recherche du temps perdu, c'est Robin Renucci qui les prononce. Et si le comédien s'assoit aujourd'hui sur la scène de la Comédie des Champs-Élysées, ce n'est pas seulement par amour des belles lettres, mais aussi parce qu'il s'est depuis longtemps engagé en faveur de la lecture publique, notamment à travers la création de l'A.R.I.A.(2). "Pour moi, affirme Robin Renucci, il existe une portée politique à la lecture. Ce genre d'exercice permet en effet un échange beaucoup plus ambitieux et profond avec le public que la représentation de théâtre traditionnelle. Car, lors d'une lecture, le spectateur n'est pas du tout placé dans la position d'un client ou d'un consommateur. Son imaginaire est sans arrêt sollicité, ce qui fait de lui un partenaire actif, un créateur à part entière." Issu d'un milieu social au sein duquel les livres n'avaient que peu de place, c'est en écoutant certains de ses enseignants lire des textes que le comédien en est venu à s'intéresser aux mots, puis au théâtre. À son tour, il souhaite aujourd'hui pouvoir transmettre, à travers la lecture, ce goût pour la littérature, le beau et l'imaginaire.
Les gammes d'un comédien
Pour Xavier Gallais, la lecture à voix haute est également une activité très particulière. Il s'agit en effet d'un exercice qu'il réalise chaque jour, chez lui, un travail qui prend part à son entraînement de comédien. "C'est comme un pianiste qui fait ses gammes, explique-t-il. Lire Proust en public revient à proposer à des spectateurs d'assister à ce travail-là. On n'est pas dans un acte de reproduction, de représentation, mais dans un acte intime de création en temps réel. Car, lorsque l'on lit un texte à haute voix, tout est encore très mouvant : le rapport charnel aux mots, à la ponctuation... Ainsi, il faut parvenir à recréer les images du texte au moment même où elles jaillissent à l'intérieur de soi. C'est un exercice qui me plaît beaucoup, pour lequel il faut savoir rester sans cesse en mouvement." S'attachant à explorer le monde de Marcel Proust à travers la plus grande authenticité et la plus grande fluidité, Xavier Gallais et ses deux partenaires de scène cherchent à plonger le public au plus profond de cette matière littéraire. Une matière qui dévoile, bien sûr, une grande finesse stylistique et psychologique, mais qui révèle également un sens du comique parfois méconnu.
(1) Xavier Gallais est également à l'affiche de Baby Doll de Tennessee Williams (aux côtés de Mélanie Thierry, Monique Chaumette, Théo Légitimus et Chick Ortega), dans une mise en scène de Benoît Lavigne, au Théâtre de l'Atelier.
(2) L'Association des Rencontres Internationales Artistiques.
Paru le 20/04/2009
(31 notes) COMÉDIE DES CHAMPS-ÉLYSÉES Du dimanche 1 février au lundi 25 mai 2009
TEXTE(S). Ce spectacle prend la forme d’une lecture qui permet d’être attentif à l’intelligence et à la subtilité du texte de Marcel Proust. Il rend accessible à tous une œuvre réputée difficile, grâce au talent de trois grands comédiens. Une lecture d’extraits de "À la recherche du temps perdu" sans interp...
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