Connexion : Adhérent - Invité - Partenaire

© Mélaine
Portrait par Jeanne Hoffstetter
Régis Santon met en scène "Baltringue Palace"
au théâtre Essaïon

Nous devons à Marie Sauvaneix, l'auteure de la pièce, d'avoir donné à Régis Santon la folle envie, après quelques années d'éloignement, de revenir à ce qui depuis ses toutes jeunes années, a nourri sa vie : Le théâtre.
Mettre en scène un tel texte, au théâtre Essaïon ? Impossible pour lui de se soustraire à une telle sollicitation.

L'homme on le sait, quelles que furent les difficultés et déconvenues auxquelles il dut parfois faire face, n'est pas du genre à sacrifier à l'appel des sirènes la conception qu'il a de son métier et de la culture. Qu'il soit comédien, metteur en scène ou auteur, qu'un jour il monte sa propre compagnie ou dirige un théâtre, il a ça profondément ancré dans la peau, dans la tête, dans le cœur. Alors forcément les coups bas, l'incompétence, l'arrogance, le blessent profondément.

Aujourd'hui, nous le voyons heureux et plein d'enthousiasme, d'autant qu'il retrouve un théâtre qui lui est cher puisqu'il en est le fondateur. « Nous étions cinq amis comédiens complètement fous lorsqu'en 1974 nous nous sommes lancés dans une telle entreprise ! Transformer en théâtre une cave médiévale magnifique devenue un garage à mobylettes. Pour mener à bien notre projet on s'est endettés et on a fait des travaux colossaux. Ça faisait longtemps que je n'y étais pas allé et j'ai constaté tout ce qui a été fait depuis. De voir ce lieu si vivant, bien entretenu, accueillant, ça m'a fait un plaisir fou. Ma dernière mise en scène remonte à 2012 au théâtre La Bruyère, alors aujourd'hui je suis comme un sportif qui d'un seul coup retrouve toutes ses sensations ! Les répétitions vont être comme toujours, un grand plaisir, on est concentré, on invente, on guette l'attitude d'un comédien qui va sans le savoir nous suggérer quelque chose, on pique et on le pousse à aller plus loin... C'est passionnant. »


Ne jamais prendre des chemins balisés tout en s'assurant d'être reçu et compris du public, a été l'obsession de ma vie.



Si «Baltringue Palace» se révèle être d'une telle actualité, Régis Santon tient à préciser qu'il ne s'agit aucunement d'opportunisme face à la poussée écologique que nous connaissons, et rappelle que le spectacle fut créé début février 2019 à « Lilas en scène ».

Que nous raconte «Baltringue Palace» qui a déclenché l'enthousiasme d'un homme de théâtre qui en a vu d'autres ? La pièce, précisons-le, s'empare de faits scientifiques dont la logique est ici poussée à l'extrême : à vouloir placer la nature au-dessus de tout, de l'humanité même, l'homme pourra-t-il échapper au funeste destin auquel cette idéologie semble le conduire ?
« L'action se passe en 2070, explique le metteur en scène, une dame âgée, jouée par Marie-France Santon, vit seule dans son appartement situé au trente-quatrième étage d'une tour et clouée dans un fauteuil. Elle a un passé brillant de jeune actrice de théâtre et vivait insouciante quand elle pouvait bouger et danser... Ce passé heureux est matérialisé sur scène par la danseuse Hélène Larrodé. L'une est immobilisée, l'autre danse. Le troisième personnage joué par Jean-Jacques Boutin, est un chien, lequel, dans l'univers poétique de Marie Sauvaneix, parle. Après être parti longtemps, avoir tout vécu, il retrouve sa maîtresse et lui apporte les nouvelles. Il sert de lien entre le passé et le présent. On pourrait dire que philosophiquement cette histoire exprime le regret de voir l'univers d'asphalte, de béton et de technologies que l'homme a créé, disparaître bouffé par une végétation tentaculaire qui aurait repris tous ses droits, et serait devenue l'ennemie. Je pense à Angkor abandonnée et complètement dévorée par la végétation depuis des siècles, ou à ces villes disparues d'Amérique du Sud, et, plus près de nous à Tchernobyl... J'ai été totalement séduit par ce contre-point des exigences écologiques actuelles, mais j'insiste, tout au long de ce texte magnifique, l'humour et la dérision sont omniprésents et j'y suis personnellement particulièrement sensible. Le résultat est en parfaite concordance avec ce que j'ai toujours essayé de faire : Ne jamais prendre des chemins balisés tout en s'assurant d'être reçu et compris du public, a été l'obsession de ma vie. On peut aussi faire le parallèle avec la pandémie qui nous frappe et nous montre combien l'homme demeure extrêmement vulnérable. Marie a écrit un texte visionnaire en forme d'apocalypse, mais exprimé sans violence. La morale de tout ça pourrait être que détruire la nature n'aurait aucun sens, pas plus que se laisser détruire par elle. C'est aussi le constat que tôt ou tard on perdra ce qu'on a, alors... Soyons gais, soyons joyeux en attendant la mort. »
Paru le 15/10/2020
BALTRINGUE PALACE
THÉÂTRE ESSAÏON
Du mercredi 30 septembre au vendredi 16 octobre 2020

THÉÂTRE CONTEMPORAIN à partir de 12 ans. Quand l'humour, le désespoir et les vertus de l'amitié se rassemblent autour du feu du Théâtre contemporain pour y faire griller des brochettes. Aux prises avec une nature qui le relègue à sa place de bipède mal équipé pour la survie, l’être humain peut-il espérer échapper à son funeste destin ? L...

Voir tous les détails