Dossier par Jeanne Hoffstetter
Un fil à la patte
de Feydeau, au théâtre Hébertot
Comment rompre avec sa jeune maîtresse, chanteuse de cabaret, lorsque le temps est venu d'assurer financièrement ses arrières ? Christophe Lidon choisit, pour sa mise en scène, de placer l'intrigue au cœur des années cinquante, sans que cela n'entache en rien l'esprit de Feydeau. Un pur plaisir !
Jean-Pierre Michaël est Bois-d'Enghien
En évoquant tout autant le cinéma, la télévision, le doublage, la Comédie Française et les scènes privées, son nom s'attache à tous les publics. Feydeau ? Pour avoir déjà joué plusieurs de ses pièces, il maîtrise. Mais ce «Fil à la patte», monté par Christophe Lidon avec une extrême rigueur, l'enthousiasme comme il avait enthousiasmé, en 2018, le public du théâtre Montparnasse. Débarrassés des clichés d'un autre âge, les histoires d'amour, les tromperies et l'appât du gain demeurent éternels, comme le génie de Feydeau auquel il n'est pourtant pas simple de se frotter. « Alors franchement, même si c'est difficile, c'est tellement extraordinaire pour nous, comédiens, quand la mise en scène est bonne ! La construction est magique avec cette accumulation d'événements et cette escalade permanente totalement hallucinante, que c'est un vrai bonheur quand ça fonctionne. Christophe Lidon, avec son énergie et sa liberté, a monté la pièce dans l'esprit des comédies américaines de Billy Wilder, Lubitsch ou Capra dans lesquelles des choses graves peuvent être légères. Il a débarrassé Feydeau des culs de poule, des perruques, des costumes trois pièces, et ça marche formidablement bien. Le personnage principal, que j'ai le bonheur de jouer, est dans un tourbillon permanent. Il a l'impression qu'aucune solution n'est possible et pourtant il en arrive toujours une, mais qui l'entraîne vers un autre problème. Il ne faut surtout pas laisser le temps au public de se poser des questions, il doit être surpris en permanence. C'est affolant, j'ai l'impression d'effectuer à chaque fois un véritable marathon. »
Ce n'est pas le personnage le plus honnête, mais c'est celui que je dois défendre !
Un sacré personnage à défendre ce Bois-d'Enghien ! « C'est un homme à femmes qui a fait la fête toute sa vie et se retrouve sans argent. Son seul moyen de s'en sortir est d'épouser une jeune héritière, mais il doit avant se débarrasser de sa maîtresse. Ça ne l'excite pas plus que ça de se ranger des voitures, c'est pourtant la mission qu'il s'est fixée mais qui s'avère plus compliquée que prévu ! Ce n'est pas le personnage le plus honnête, mais c'est celui que je dois défendre ! » Sacha Guitry disait en gros de Feydeau, qu'il avait le pouvoir infaillible de faire rire. Un pouvoir que peu possèdent réellement, contrairement à celui d'émouvoir. Qu'est-ce que la Comédie ? « La comédie, c'est un miracle tellement fragile ! Pour en avoir joué autant que de tragédies, c'est à mon sens la chose la plus difficile pour un comédien et un metteur en scène que d'arriver à emmener une salle avec soi. Il faut qu'elle se laisse faire, alors on ne peut pas y aller à l'économie, et chaque représentation est un défi. Et aujourd'hui plus que jamais, on a besoin de légèreté, on a besoin de Feydeau pour s'amuser et se vider la tête ! »
Catherine Jacob est la baronne Duverger, mère de la jeune héritière.
Parlant de théâtre, elle se souvient de la première fois où elle y est allée, « des envolées » de sa mère qui subitement décidait d'une sortie en famille à la Comédie Française. « J'étais gamine et c'était Le Bourgeois gentilhomme, avec Louis Seigner je crois. Ça m'a totalement électrocutée. L'endroit déjà, tellement somptueux ! Les changements de décors, comme du vrai mais dans du faux, j'étais fascinée. » Les souvenirs surgissent, elle s'inscrit au cours Florent « J'en avais marre de faire ce qu'on attendait de moi, d'être gentille, alors j'ai tout envoyé bouler. J'ai adoré la personne de François Florent. C'était formidable par exemple de le regarder, regarder les autres. Et avec lui, il ne fallait pas se la raconter ! » Depuis, c'est elle aussi que le public applaudit, mais lui dire qu'elle a joué presque tous les types de rôles, c'est s'entendre répondre dans un rire : « Oh, non ! Je pense simplement qu'il faut équilibrer tout ça. C'est tout. »
Je suis celle qui a l'argent et c'est lui le moteur de la pièce
L'équilibre veut donc qu'après avoir récemment tourné diverses choses pour la télévision et joué dans «Papy fait de la résistance» au théâtre de Paris, elle reprend «Un fil à la patte», quatre ans après l'avoir joué avec le succès que l'on sait. La baronne, donc. « Je suis celle qui a l'argent et c'est lui le moteur de la pièce. La jeune héritière que veut épouser Bois-d'Enghien est ma fille. Christophe a transposé ça, mais l'histoire est intemporelle, que fait-on quand on n'a plus de sous et que l'on veut l'argent plutôt que l'amour ? Tout est là. La baronne, bien que très coincée dans son petit monde aristo avec son coiffeur, sa déco, ses dîners, ses magouilles, elle est quand même un peu...chaudasse. Sans aller jusqu'à la caricature, il faut assumer le truc. Elle croit avoir élevé sa fille comme une petite oie blanche, en conformité avec ce milieu, mais telle mère telle fille, la gamine est bien renseignée, c'est une ingénue perverse et ce qui l'intéresse ce n'est pas l'argent, mais la crapule Bois d'Enghien, le séducteur qu'elle attrape au lasso grâce à l'argent de sa mère. Il ne faut jamais oublier que Feydeau, ce n'est pas la vieille histoire du ménage à trois comme ça en a l'air. En réalité ce sont toujours des histoires d'argent. » Quant aux spectateurs qui disent venir avant tout pour elle, la réponse fuse. « Alors là, je ne voudrais pas qu'il y ait confusion «Un Fil à la patte» ce n'est pas moi, c'est une pièce, et c'est une troupe formidable. Alors, venez nombreux, c'est le printemps, on a le droit de sortir et de s'amuser ! »
Noémie Elbaz est Lucette, la maîtresse
« Attendez, je me pose ! Je faisais juste une petite pratique de yoga en vous attendant.» Noémie Elbaz est joyeuse, passionnée et particulièrement heureuse de reprendre ce rôle de Lucette qui l'enchante. Entre cinéma, télévision et théâtre, son cœur ne balance pas. Partout elle est à l'aise depuis qu'à l'âge de dix-neuf ans elle débutait sa carrière sur les planches du théâtre de Poche. Mais elle n'avait jamais joué Feydeau avant. « Il est vrai que le premier acte est celui de Lucette, donc c'est sportif, mais j'ai l'endurance pour ça ! J'aime les rôles physiques où on utilise son corps, et il vaut mieux pour gambader sur des talons de huit centimètres comme je le fais là ! Donc oui, je me régale ! Mais c'est aussi un spectacle choral que Christophe a imaginé comme une comédie américaine des années cinquante, tout en gardant l'esprit de Feydeau. C'est infiniment joyeux et on a un plaisir fou, à commencer parce que la pièce elle-même est géniale, c'est de l'or en barre ! »
Avec Christophe on est allés vers quelque chose d'un peu sulfureux
Alors, que devient Lucette dans cette comédie ? « Avec Christophe on est allés vers quelque chose d'un peu sulfureux. Avec mon côté méditerranéen et solaire en même temps, c'est du coup... Un peu latin à la Penelope Cruz. Lucette est une passionnée ! Et quand elle comprend que son charmant lui échappe, qu'il va se marier, elle décide de se venger. En fait, je ne lui donne pas un côté cocotte. Lucette, tout le monde a envie d'être son ami, elle est bien dans ses baskets, très sociable, comme je le suis moi-même. Elle est folle amoureuse et a envie de partager ça avec la terre entière. Jean-Pierre lui, c'est un roc, avec une puissance de jeu, une précision, une énergie ! Moi je suis une petite mouche qui s'agite autour de lui, qui s'agrippe à lui. Je trouve que Cristophe a toute la folie de Feydeau, à laquelle il ajoute son élégance. Les costumes de Chouchane sont magnifiques aussi, la musique, tout ! J'adore ce spectacle, j'adore le jouer et on forme tous ensemble une équipe de rêve ! »
En évoquant tout autant le cinéma, la télévision, le doublage, la Comédie Française et les scènes privées, son nom s'attache à tous les publics. Feydeau ? Pour avoir déjà joué plusieurs de ses pièces, il maîtrise. Mais ce «Fil à la patte», monté par Christophe Lidon avec une extrême rigueur, l'enthousiasme comme il avait enthousiasmé, en 2018, le public du théâtre Montparnasse. Débarrassés des clichés d'un autre âge, les histoires d'amour, les tromperies et l'appât du gain demeurent éternels, comme le génie de Feydeau auquel il n'est pourtant pas simple de se frotter. « Alors franchement, même si c'est difficile, c'est tellement extraordinaire pour nous, comédiens, quand la mise en scène est bonne ! La construction est magique avec cette accumulation d'événements et cette escalade permanente totalement hallucinante, que c'est un vrai bonheur quand ça fonctionne. Christophe Lidon, avec son énergie et sa liberté, a monté la pièce dans l'esprit des comédies américaines de Billy Wilder, Lubitsch ou Capra dans lesquelles des choses graves peuvent être légères. Il a débarrassé Feydeau des culs de poule, des perruques, des costumes trois pièces, et ça marche formidablement bien. Le personnage principal, que j'ai le bonheur de jouer, est dans un tourbillon permanent. Il a l'impression qu'aucune solution n'est possible et pourtant il en arrive toujours une, mais qui l'entraîne vers un autre problème. Il ne faut surtout pas laisser le temps au public de se poser des questions, il doit être surpris en permanence. C'est affolant, j'ai l'impression d'effectuer à chaque fois un véritable marathon. »
Ce n'est pas le personnage le plus honnête, mais c'est celui que je dois défendre !
Un sacré personnage à défendre ce Bois-d'Enghien ! « C'est un homme à femmes qui a fait la fête toute sa vie et se retrouve sans argent. Son seul moyen de s'en sortir est d'épouser une jeune héritière, mais il doit avant se débarrasser de sa maîtresse. Ça ne l'excite pas plus que ça de se ranger des voitures, c'est pourtant la mission qu'il s'est fixée mais qui s'avère plus compliquée que prévu ! Ce n'est pas le personnage le plus honnête, mais c'est celui que je dois défendre ! » Sacha Guitry disait en gros de Feydeau, qu'il avait le pouvoir infaillible de faire rire. Un pouvoir que peu possèdent réellement, contrairement à celui d'émouvoir. Qu'est-ce que la Comédie ? « La comédie, c'est un miracle tellement fragile ! Pour en avoir joué autant que de tragédies, c'est à mon sens la chose la plus difficile pour un comédien et un metteur en scène que d'arriver à emmener une salle avec soi. Il faut qu'elle se laisse faire, alors on ne peut pas y aller à l'économie, et chaque représentation est un défi. Et aujourd'hui plus que jamais, on a besoin de légèreté, on a besoin de Feydeau pour s'amuser et se vider la tête ! »
Catherine Jacob est la baronne Duverger, mère de la jeune héritière.
Parlant de théâtre, elle se souvient de la première fois où elle y est allée, « des envolées » de sa mère qui subitement décidait d'une sortie en famille à la Comédie Française. « J'étais gamine et c'était Le Bourgeois gentilhomme, avec Louis Seigner je crois. Ça m'a totalement électrocutée. L'endroit déjà, tellement somptueux ! Les changements de décors, comme du vrai mais dans du faux, j'étais fascinée. » Les souvenirs surgissent, elle s'inscrit au cours Florent « J'en avais marre de faire ce qu'on attendait de moi, d'être gentille, alors j'ai tout envoyé bouler. J'ai adoré la personne de François Florent. C'était formidable par exemple de le regarder, regarder les autres. Et avec lui, il ne fallait pas se la raconter ! » Depuis, c'est elle aussi que le public applaudit, mais lui dire qu'elle a joué presque tous les types de rôles, c'est s'entendre répondre dans un rire : « Oh, non ! Je pense simplement qu'il faut équilibrer tout ça. C'est tout. »
Je suis celle qui a l'argent et c'est lui le moteur de la pièce
L'équilibre veut donc qu'après avoir récemment tourné diverses choses pour la télévision et joué dans «Papy fait de la résistance» au théâtre de Paris, elle reprend «Un fil à la patte», quatre ans après l'avoir joué avec le succès que l'on sait. La baronne, donc. « Je suis celle qui a l'argent et c'est lui le moteur de la pièce. La jeune héritière que veut épouser Bois-d'Enghien est ma fille. Christophe a transposé ça, mais l'histoire est intemporelle, que fait-on quand on n'a plus de sous et que l'on veut l'argent plutôt que l'amour ? Tout est là. La baronne, bien que très coincée dans son petit monde aristo avec son coiffeur, sa déco, ses dîners, ses magouilles, elle est quand même un peu...chaudasse. Sans aller jusqu'à la caricature, il faut assumer le truc. Elle croit avoir élevé sa fille comme une petite oie blanche, en conformité avec ce milieu, mais telle mère telle fille, la gamine est bien renseignée, c'est une ingénue perverse et ce qui l'intéresse ce n'est pas l'argent, mais la crapule Bois d'Enghien, le séducteur qu'elle attrape au lasso grâce à l'argent de sa mère. Il ne faut jamais oublier que Feydeau, ce n'est pas la vieille histoire du ménage à trois comme ça en a l'air. En réalité ce sont toujours des histoires d'argent. » Quant aux spectateurs qui disent venir avant tout pour elle, la réponse fuse. « Alors là, je ne voudrais pas qu'il y ait confusion «Un Fil à la patte» ce n'est pas moi, c'est une pièce, et c'est une troupe formidable. Alors, venez nombreux, c'est le printemps, on a le droit de sortir et de s'amuser ! »
Noémie Elbaz est Lucette, la maîtresse
« Attendez, je me pose ! Je faisais juste une petite pratique de yoga en vous attendant.» Noémie Elbaz est joyeuse, passionnée et particulièrement heureuse de reprendre ce rôle de Lucette qui l'enchante. Entre cinéma, télévision et théâtre, son cœur ne balance pas. Partout elle est à l'aise depuis qu'à l'âge de dix-neuf ans elle débutait sa carrière sur les planches du théâtre de Poche. Mais elle n'avait jamais joué Feydeau avant. « Il est vrai que le premier acte est celui de Lucette, donc c'est sportif, mais j'ai l'endurance pour ça ! J'aime les rôles physiques où on utilise son corps, et il vaut mieux pour gambader sur des talons de huit centimètres comme je le fais là ! Donc oui, je me régale ! Mais c'est aussi un spectacle choral que Christophe a imaginé comme une comédie américaine des années cinquante, tout en gardant l'esprit de Feydeau. C'est infiniment joyeux et on a un plaisir fou, à commencer parce que la pièce elle-même est géniale, c'est de l'or en barre ! »
Avec Christophe on est allés vers quelque chose d'un peu sulfureux
Alors, que devient Lucette dans cette comédie ? « Avec Christophe on est allés vers quelque chose d'un peu sulfureux. Avec mon côté méditerranéen et solaire en même temps, c'est du coup... Un peu latin à la Penelope Cruz. Lucette est une passionnée ! Et quand elle comprend que son charmant lui échappe, qu'il va se marier, elle décide de se venger. En fait, je ne lui donne pas un côté cocotte. Lucette, tout le monde a envie d'être son ami, elle est bien dans ses baskets, très sociable, comme je le suis moi-même. Elle est folle amoureuse et a envie de partager ça avec la terre entière. Jean-Pierre lui, c'est un roc, avec une puissance de jeu, une précision, une énergie ! Moi je suis une petite mouche qui s'agite autour de lui, qui s'agrippe à lui. Je trouve que Cristophe a toute la folie de Feydeau, à laquelle il ajoute son élégance. Les costumes de Chouchane sont magnifiques aussi, la musique, tout ! J'adore ce spectacle, j'adore le jouer et on forme tous ensemble une équipe de rêve ! »
Paru le 28/04/2022
(12 notes) THÉÂTRE HÉBERTOT Du mardi 5 avril au dimanche 26 juin 2022
COMÉDIE. Comment se débarrasser d’une maîtresse lorsqu’on prévoit de se marier le jour même avec une riche héritière ? Voici ce à quoi s’emploie Bois d’Enghien, amant de Lucette Gautier, chanteuse à la mode, artiste réclamée par la baronne Duverger pour la signature du contrat de mariage de sa fille avec.....
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