Pépite par Patrick Adler
Mademoiselle Chanel en hiver
Chanel, quelle allure !
Vous avez aimé son « Irrésisitible Offenbach ». Comme moi. Vous avez adoré ses partis pris de metteur en scène, son sens du décor, des costumes, des lumières, sa direction d'acteurs. Pareil. Je plussoie. Et comme un bonheur ne vient jamais seul, vous allez la retrouver dans son autre création « Mademoiselle Chanel en hiver ». Même lieu, juste un peu plus tôt (19h en semaine). Le Théâtre de Passy est bien avisé d'accorder sa confiance à Anne Bourgeois qui, avec brio, passe d'un univers à l'autre (Belle Epoque /Après-guerre ), d'un musical à un presque huis clos, de la farce au mélodrame.
« Mademoiselle Chanel en hiver », ce n'est pas « Martine à la neige » ni « Martine au ski »... je galèje. Non, c'est l'évocation d'une page d'histoire assez peu connue du grand public : la retraite forcée ou, plus simplement, l'exil de la couturière mythique et de son « hagiographe », Paul Morand, en Suisse. C'est une plongée dans l'après-guerre des collabos qui ont, pour beaucoup, trouvé refuge au pays des montres.
Avec, pour corollaire, l'ennui face au temps qui passe en hiver... même dans une retraite dorée.
Gabrielle Chanel (divinement et justement incarnée dans la voix comme dans la gestuelle par Caroline Sihol) pourrait verser dans ce bovarysme. C'est sans compter sur son caractère trempé, frondeur. L'amazone assume tout : sa relation avec un Officier du Reich, ses amours saphiques, son addiction à la cigarette autant qu'au travail, son goût du beau, son intolérance face à tout ce qui rabaisse : la faiblesse, la lâcheté. Vous la trouverez garce, cruelle mais son élégance pardonne tout, même son mépris de classe, son ironie mordante, sa répartie glaçante mais ô combien savoureuse. Face à elle, un autre monstre : Paul Morand, (belle incarnation de Christophe Barbier) qui se rêve « Immortel » mais ne sert pour l'heure que de pis-aller à la couturière mythique en écrivant ses mémoires, enfin, en essayant car Mademoiselle Chanel a ses humeurs, ses caprices, c'est quand elle veut, où elle veut.
Leurs joutes verbales sont savoureuses et donnent du rythme à la pièce. Chacun tient bon. Gabrielle Chanel, en féministe affichée, n'entend pas se faire dominer. Sur l'échiquier, la Reine avale pions et cavaliers, jusqu'à son amant ( Emmanuel Lemire ), un ancien espion du Reich qui a pourtant tout fait pour la retrouver, dont elle est apparemment amoureuse jusqu'à ce qu'il commette l'irréparable : garder ses chaussures au lit. Sachant qu'il sort du tennis et qu'elle a horreur de l'ocre de la terre battue ...Le Diable se niche dans les détails.
Altière, le port hiératique, toujours impeccablement vêtue et maquillée dans ce décor de rêve Art-Déco, Chanel-Sihol incarne le glamour, l'inaccessible. On cherche la faille chez elle.
Elle qui dit couper droit, ne jamais biaiser avec les ciseaux. En vain. Et pourtant, l'espoir nait quand elle demande au serveur du Palace (convaincant Thomas Espinera) - il est Juif - de se mettre à son service. Il y a un sentiment de solitude inavoué chez elle, son humour ravageur cache des failles, celles de la passion, de la chair, celles qui font mal.
Avec élégance, elle déambule, immuable. Froide comme l'hiver. Mais rayonnante comme l'été. Quelle allure !
Avec, pour corollaire, l'ennui face au temps qui passe en hiver... même dans une retraite dorée.
Gabrielle Chanel (divinement et justement incarnée dans la voix comme dans la gestuelle par Caroline Sihol) pourrait verser dans ce bovarysme. C'est sans compter sur son caractère trempé, frondeur. L'amazone assume tout : sa relation avec un Officier du Reich, ses amours saphiques, son addiction à la cigarette autant qu'au travail, son goût du beau, son intolérance face à tout ce qui rabaisse : la faiblesse, la lâcheté. Vous la trouverez garce, cruelle mais son élégance pardonne tout, même son mépris de classe, son ironie mordante, sa répartie glaçante mais ô combien savoureuse. Face à elle, un autre monstre : Paul Morand, (belle incarnation de Christophe Barbier) qui se rêve « Immortel » mais ne sert pour l'heure que de pis-aller à la couturière mythique en écrivant ses mémoires, enfin, en essayant car Mademoiselle Chanel a ses humeurs, ses caprices, c'est quand elle veut, où elle veut.
Leurs joutes verbales sont savoureuses et donnent du rythme à la pièce. Chacun tient bon. Gabrielle Chanel, en féministe affichée, n'entend pas se faire dominer. Sur l'échiquier, la Reine avale pions et cavaliers, jusqu'à son amant ( Emmanuel Lemire ), un ancien espion du Reich qui a pourtant tout fait pour la retrouver, dont elle est apparemment amoureuse jusqu'à ce qu'il commette l'irréparable : garder ses chaussures au lit. Sachant qu'il sort du tennis et qu'elle a horreur de l'ocre de la terre battue ...Le Diable se niche dans les détails.
Altière, le port hiératique, toujours impeccablement vêtue et maquillée dans ce décor de rêve Art-Déco, Chanel-Sihol incarne le glamour, l'inaccessible. On cherche la faille chez elle.
Elle qui dit couper droit, ne jamais biaiser avec les ciseaux. En vain. Et pourtant, l'espoir nait quand elle demande au serveur du Palace (convaincant Thomas Espinera) - il est Juif - de se mettre à son service. Il y a un sentiment de solitude inavoué chez elle, son humour ravageur cache des failles, celles de la passion, de la chair, celles qui font mal.
Avec élégance, elle déambule, immuable. Froide comme l'hiver. Mais rayonnante comme l'été. Quelle allure !
Paru le 27/04/2023
(96 notes) Théâtre de Passy Du mercredi 11 janvier 2023 au vendredi 16 février 2024
COMÉDIE. À la Libération, la liaison affichée de Gabrielle Chanel avec un officier allemand, menace de lui attirer de graves ennuis : son ami Winston Churchill la fait exfiltrer en Suisse où s'est déjà réfugiée la fine fleur de la collaboration. Pour vaincre son impatience, Mademoiselle commence à dicter s...
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