Prêts pour le voyage dans les dernières mines de charbon ? Imaginez-vous en 1965. Au siècle dernier. Repassez-vous en boucle ce qui est devenu un hymne dans le Nord : Les Corons, de feu Pierre Bachelet. Ouvrez les yeux. Ça y est. Vous y êtes. Le décor et la bande-son sont criants de vérité, comme le récit, les dialogues de Stéphane et Ahmed, tous deux mineurs, coincés six pieds sous terre. L'épreuve est lourde, les secours vont-ils intervenir à temps ? Pour chasser l'angoisse et la peur, chacun convoque ses souvenirs. Les images défilent : l'Algérie d'Ahmed, le soleil qui irradie même la cuisine, Stéphane en perçoit même les effluves. À son tour, il évoque les traditions de la Pologne, les Noëls chantant. Ahmed se projette dans le froid. La neige, ce blanc qui contraste tant avec sa condition de mineur. Plus on avance, plus l'intimité se crée. On invoque la famille, on se projette, on imagine, on rêve... La réalité reprend vite le dessus, avec ce sentiment vissé au corps d'appartenir à la mine. Au milieu des bruits inquiétants on se rassure, on plaisante, on pleure aussi.

C'est puissant et beau, à l'image du texte de Hugues Duquesne et de Kader Nemer que servent avec talent ce dernier et Erwan Orain. Ils sont bouleversants de sincérité et, dans ce climat actuel délétère, il est bon de voir que le "vivre ensemble" fait sens.
La mise en scène d'Ali Bougheraba et de Léa Moussy est comme toujours léchée et précise. À défaut de liberté et d'égalité, la fraternité est ici à l'honneur et le public communie. Chaque soir au Roi René, on a tous quelque chose en nous des mineurs et ça, c'était l'enjeu... majeur de la pièce. Une pleine réussite !

A 19h25 au Roi René
4 bis rue Grivolas
84000. Avignon