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D.R.
Article de Patrick Adler
La fin du début
Au Théâtre Lepic

Avec ce titre pour le moins « baroque » où, à la manière d'un Devos, il va jouer en Absurdie de ces trois composantes : le début, la fin, le milieu, Solal Bouloudnine construit son récit. Celui d'une vie marquée par le décès de Michel Berger, à quelques pas de chez lui en vacances, à quelques jours de son 7è anniversaire. C'était un 2 août 1992. Ce jour-là, tout bascule. Solal vient de rencontrer la mort et de comprendre la fugacité de l'existence.
Tapi sous un bureau, une lampe de mineur sur le front, le visage enfariné, il s'extirpe progressivement de sa cachette pendant que le public s'installe et découvre, sous les stridulations des cigales, un plateau digne de Diogène, le joyeux bordel d'une chambre d'enfant où même l'eau douteuse de l'aquarium dans lequel il va plonger ses mains interroge. Raquette à la main, il mime un match de tennis, se faisant à la fois joueur et arbitre. Le décor est planté. Il va falloir se faire à la fantasmagorie de ce doux-dingue retombé en enfance qui questionne en adulte le monde qu'il a traversé depuis cette date fatidique. Alors, dans une galerie de portraits savoureuse qui voit apparaître un père chirurgien désabusé, très « show off (clope au bec et lunettes de soleil), une mère juive exubérante, une bouchère, un entraîneur de foot, un rabbin volubile, une institutrice débordée et même ... France Gall, il s'amuse (et nous amuse) follement. Ses pastiches sont irrésistibles, sons sens de la scène et du rythme au cordeau, il a l'art du construit/déconstruit et ne manque pas de nous surprendre. On pourrait en rester là, le ranger dans la catégorie « stand-upper comique ». C'est vite oublier que derrière cette douce folie, ses excentricités dans le jeu et dans la voix (il passe facilement du médium au stentor), il y a toujours une réflexion fine et grave sur l'enfance, cette angoisse de la fin chez cet angoissé névrotique de la mort, surtout depuis qu'il a passé le cap de la paternité ...et de la quarantaine. Michel Berger est bien mort à 44 ans ! Michel, qui est omniprésent dans sa vie comme dans son spectacle par le tennis, la judéité, la médecine (qui ne connait pas Jean Hamberger, le père de Michel, premier à avoir tenté la greffe du rein) jusqu'à devenir la bande-son du spectacle. Alors, pendant quatre-vingt dix minutes, il va jouer ce match, il va jouer à déjouer la mort ... sur scène car jouer est un acte salvateur. Bienvenue chez Caubere ! Le public est conquis. Nous aussi.

Comme tu (te) le dis si bien, Solal, essaie d'être heureux, ça vaut le coup ! Et tu le mérites tellement, puisque tu n'en es qu'au début...d'une longue carrière !
Paru le 16/10/2024

(4 notes)
FIN DU DÉBUT (LA)
THÉÂTRE LEPIC
Jusqu'au lundi 30 décembre

SEUL-E EN SCÈNE à partir de 12 ans. Le comédien Solal Bouloudnine nous plonge dans l’univers d’un enfant des années 90 qui réalise, comme tous les enfants avant et après lui, que tout a une fin, à commencer par la vie. Nous traversons avec lui une vie marquée par l’angoisse de la fin, dans une comédie touchante et vertigineuse. Une ...

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