Zoom par Patrick Adler
Le Prix du Brigadier version 2024
Au Théâtre Montparnasse
Nous sommes jeudi 12 janvier... et toujours pas de Premier Ministre. Pas de gouvernement. Pendant ce temps, un groupe d'irréductibles comédiens attend fébrilement devant le Théâtre Montparnasse. Pour rien au monde, ils ne manqueraient ce rendez-vous annuel du Prix du Brigadier, une institution vieille de 60 ans qui offre la récompense suprême à des comédiens, auteurs, metteurs en scène, décorateurs... Les places sont chères pour cette 44è édition qui va sacrer le fleuron théâtral de l'année. La salle se remplit en quelques minutes. L'Association de la Régie Théâtrale, rompue à l'exercice depuis sa création en 1960, est d'une redoutable efficacité. Elle est aidée par quelques membres du Jury dont l'incontournable attaché de presse, Pierre Cordier. Avec son allure de questeur du Parlement, il prend soin de placer avec diligence les "happy few". On a le sens du "timing" à l'A.R.T. et on fait en sorte de démarrer à l'heure prévue.
Le Tout-Paris du théâtre, cher à notre regretté Jean-Claude Brialy, est là et s'est mis sur son 31. Pour certains(es), comme Béatrice Costantini ou Frédérique Lazzarini, l'ambiance est très "Congrès de Vienne" ; pour d'autres comme Caroline Loeb, la tendance est plus moderne, plus "Fashion week". Cela ne nous dit pas pourquoi elle a préféré garder sa chapka. Il n'y a pas la moindre fuite au plafond...
Les photographes sont en place. Dominique Besnéhard est là, il survole d'un regard l'assemblée et semble faire son casssssssting. Anny Duperey salue du balcon ses coreligionnaires, Macha Méril avance à grands pas en duffle-coat rouge et fait forte impression, de jeunes comédiens(nes) savourent le bonheur d'être là et se jurent de ne pas perdre une miette de la cérémonie quand de plus anciens s'endormiront - j'ai les noms - ou ponctueront les discours de leur toux grasse. La grippe n'est pas loin.
C'est le facétieux Jean-Pierre Hané, Secrétaire Général de l'A.R.T., qui ouvre le bal. On le croirait sorti de chez Chartier avec sa tenue de serveur couleur Bordeaux, peut-être se prépare-t-il au Bouillon ou à officier pour le cocktail à suivre... Souriant et un brin taquin, il déroule avec élégance son chapelet de remerciements. Adepte de la contraction de texte, il fera court, montrant la voie aux deux derniers lauréats : Minne Vergès et Jacques Rouveyrollis.
And the winner is...
Très "Neuilly-Merteuil-Passy", Delphine Depardieu, élégante et sobre, reçoit le premier Brigadier. Il est temps pour elle de répondre aux compliments de Stéphanie Fagadau, directrice de la Comédie des Champs-Elysées. Convoquant ses souvenirs, on découvre avec admiration comment elle a dû batailler pour se faire un prénom.
Après l'émotion, la farce. Le facétieux - et génial - Michel Fau prend le relais sur scène. Débarrassé de sa longue fourrure aux couleurs chatoyantes qui attaquent la rétine - on crut voir un Tsar de Russie- il semble aérien, prêt, avant de s'envoler, à donner quelques coups de bec bien sentis. Le ton est effectivement alerte, mordant. Après avoir encensé la cérémonie du Prix du Brigadier et le récipiendaire du jour : le non moins génial Maxime d'Aboville, il égratigne avec force ironie les Molières (Il faut dire qu'il n'en a jamais eu un seul !), les mauvais acteurs, les faux amis... on était parti pour un inventaire à la Prévert tant l'homme est disert mais Maxime d'Aboville attendait son tour. Sans préparation aucune, le flamboyant comédien se lança dans un mini one-man show époustouflant, rythmé, agrémenté d'anecdotes croustillantes et même d'une imitation hilarante de feue Myriam de Colombi. Le public en redemandait. C'est dans cette atmosphère surchauffée qu'apparut, impériale, Geneviève Casile, saluée d'emblée par une longue standing-ovation. Recevant à 87 printemps le Brigadier d'honneur pour l'ensemble de sa carrière, elle surprit à son tour le public, avouant qu'elle ne se remettait toujours pas de ne pas avoir embrassé une carrière de danseuse. Sur un mode badin et distancié, elle conta par le menu et avec ironie son parcours jalonné de succès, si loin des chaussons et des pointes, remisés depuis au Grenier des Souvenirs.
Suivit après un long panégyrique d'Anne Delbée Minne Vergès, une autre gamine de 89 printemps... Plus timide, en dépit de son renom stratosphérique, la Reine du Costume n'en tailla aucun, fidèle sans doute à la formule Shakespearienne "Rest is silence". Jacques Rouveyrollis, le dernier récipiendaire, homme de l'ombre et incontournable phare de toutes les scènes, préférant les lumières aux sons, se montra lui aussi économe de mots. Ainsi s'acheva la 24è édition avec, pour point d'orgue, le dévoilement de la plaque commémorative à l'entrée du théâtre de celle qui fut pendant des décennies l'âme de ce lieu : Myriam de Colombi
Chaque année, le Prix du Brigadier, en dehors du plaisir qu'il donne aux acteurs de se voir ou se revoir, de communier dans ce Temple des mots, des émotions, du beau, est nécessaire et l'adresse de Pascal Guillaume, producteur, à l'actuelle Responsable des Affaires Culturelles de Paris, Mme Aurélie Filipetti, sur l'état du budget, diminué de 40% et les attaques répétées sur le Théâtre Privé, font sens. Cela fut dit, poliment dit. Avec courtoisie. Le théâtre, à l'instar des lieux de culte, est quelque part "sanctuarisé".
Sachons garder cette belle élégance !
Les photographes sont en place. Dominique Besnéhard est là, il survole d'un regard l'assemblée et semble faire son casssssssting. Anny Duperey salue du balcon ses coreligionnaires, Macha Méril avance à grands pas en duffle-coat rouge et fait forte impression, de jeunes comédiens(nes) savourent le bonheur d'être là et se jurent de ne pas perdre une miette de la cérémonie quand de plus anciens s'endormiront - j'ai les noms - ou ponctueront les discours de leur toux grasse. La grippe n'est pas loin.
C'est le facétieux Jean-Pierre Hané, Secrétaire Général de l'A.R.T., qui ouvre le bal. On le croirait sorti de chez Chartier avec sa tenue de serveur couleur Bordeaux, peut-être se prépare-t-il au Bouillon ou à officier pour le cocktail à suivre... Souriant et un brin taquin, il déroule avec élégance son chapelet de remerciements. Adepte de la contraction de texte, il fera court, montrant la voie aux deux derniers lauréats : Minne Vergès et Jacques Rouveyrollis.
And the winner is...
Très "Neuilly-Merteuil-Passy", Delphine Depardieu, élégante et sobre, reçoit le premier Brigadier. Il est temps pour elle de répondre aux compliments de Stéphanie Fagadau, directrice de la Comédie des Champs-Elysées. Convoquant ses souvenirs, on découvre avec admiration comment elle a dû batailler pour se faire un prénom.
Après l'émotion, la farce. Le facétieux - et génial - Michel Fau prend le relais sur scène. Débarrassé de sa longue fourrure aux couleurs chatoyantes qui attaquent la rétine - on crut voir un Tsar de Russie- il semble aérien, prêt, avant de s'envoler, à donner quelques coups de bec bien sentis. Le ton est effectivement alerte, mordant. Après avoir encensé la cérémonie du Prix du Brigadier et le récipiendaire du jour : le non moins génial Maxime d'Aboville, il égratigne avec force ironie les Molières (Il faut dire qu'il n'en a jamais eu un seul !), les mauvais acteurs, les faux amis... on était parti pour un inventaire à la Prévert tant l'homme est disert mais Maxime d'Aboville attendait son tour. Sans préparation aucune, le flamboyant comédien se lança dans un mini one-man show époustouflant, rythmé, agrémenté d'anecdotes croustillantes et même d'une imitation hilarante de feue Myriam de Colombi. Le public en redemandait. C'est dans cette atmosphère surchauffée qu'apparut, impériale, Geneviève Casile, saluée d'emblée par une longue standing-ovation. Recevant à 87 printemps le Brigadier d'honneur pour l'ensemble de sa carrière, elle surprit à son tour le public, avouant qu'elle ne se remettait toujours pas de ne pas avoir embrassé une carrière de danseuse. Sur un mode badin et distancié, elle conta par le menu et avec ironie son parcours jalonné de succès, si loin des chaussons et des pointes, remisés depuis au Grenier des Souvenirs.
Suivit après un long panégyrique d'Anne Delbée Minne Vergès, une autre gamine de 89 printemps... Plus timide, en dépit de son renom stratosphérique, la Reine du Costume n'en tailla aucun, fidèle sans doute à la formule Shakespearienne "Rest is silence". Jacques Rouveyrollis, le dernier récipiendaire, homme de l'ombre et incontournable phare de toutes les scènes, préférant les lumières aux sons, se montra lui aussi économe de mots. Ainsi s'acheva la 24è édition avec, pour point d'orgue, le dévoilement de la plaque commémorative à l'entrée du théâtre de celle qui fut pendant des décennies l'âme de ce lieu : Myriam de Colombi
Chaque année, le Prix du Brigadier, en dehors du plaisir qu'il donne aux acteurs de se voir ou se revoir, de communier dans ce Temple des mots, des émotions, du beau, est nécessaire et l'adresse de Pascal Guillaume, producteur, à l'actuelle Responsable des Affaires Culturelles de Paris, Mme Aurélie Filipetti, sur l'état du budget, diminué de 40% et les attaques répétées sur le Théâtre Privé, font sens. Cela fut dit, poliment dit. Avec courtoisie. Le théâtre, à l'instar des lieux de culte, est quelque part "sanctuarisé".
Sachons garder cette belle élégance !
Paru le 13/12/2024