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© Bruno Perroud
Interview par Jeanne Hoffstetter
Christiane Millet
Juste la fin du monde

En 1990, Jean-Luc Lagarce écrit "Juste la fin du monde". Il se sait atteint du sida et décèdera cinq ans plus tard. Au cœur de l'histoire, Louis revenu après des années d'absence dans sa famille pour lui annoncer une terrible nouvelle... Johanny Bert met en scène à son tour ce grand classique du théâtre contemporain.
Habituée du répertoire classique autant que contemporain, vous abordez pour la première fois l'univers de Jean-Luc Lagarce. Quel est votre sentiment à la veille des répétitions ?
Il est incontournable et je le connaissais comme tout le monde mais n'étais pas particulièrement « aficionado ». Maintenant c'est différent, en étant plongée dans ce texte majeur je le découvre d'une autre façon. C'est un cauchemar à apprendre, un peu comme du Ionesco, mais quand on sait le texte je peux vous dire qu'on le saura toute sa vie !

La pièce, non autobiographique, aborde entre autres le thème de l'incommunicabilité, celui du retour à travers Louis, sorte de fils prodigue... Chacun peut y voir son niveau de lecture. Parlez-moi de cette famille, de ses querelles et de votre rôle au milieu.
C'est encore un peu tôt pour en parler, les choses peuvent bouger mais en effet on peut voir dans la pièce plusieurs niveaux de lecture, alors il faut se libérer d'un tas de choses et se l'approprier en allant en profondeur. C'est excitant au possible. Je pense que si les membres de cette famille ne parviennent pas à communiquer, ils essaient pourtant désespérément de se parler, simplement il est trop tard, alors ils disent tout ce qu'ils ont sur le cœur, mais ce n'est pas "Règlements de comptes à OK Corral" ! Non, moi je vois derrière ça beaucoup d'amour, et c'est là que ça devient vertigineux et passionnant. La mère que je joue sait ce qu'il va se passer, elle le dit, elle connait ses enfants et elle appréhende un peu... Voilà, il n'y a pas d'enfermement, mais une attente immense de l'autre. C'est ce que ça raconte et je n'invente rien, c'est écrit.

Le parcours artistique de Jean-Luc Lagarce intéresse particulièrement Johanny Bert qui ne cache ressentir envers l'auteur une forme de proximité. Sa mise en scène onirique dont nous ménagerons la surprise, en témoigne.
Sa volonté de mettre en scène ce texte répond à un désir profond et ce qu'il nous propose est magnifique. Nous adorons travailler avec lui, il propose, il écoute et nous met dans un écrin extraordinaire auquel on ne s'attendait pas.

Le titre, « Juste la fin du monde », à lui seul exprime tant de choses !
Oui... « Juste », c'est comme des enfants qui joueraient et diraient : C'est juste la catastrophe. Mais vous allez voir le travail que Vincent a fait pour jouer Louis, à partir du Journal de Lagarce que les gens ne lisent pas forcément. Le mot tricher revient souvent, et c'est ça, il triche aussi avec la mort et va très loin dans cette tricherie intellectuelle sur laquelle il revient souvent. Mais on pourrait en parler des heures et en même temps se dire qu'on dit des bêtises et qu'on a encore tout à découvrir. C'est passionnant !
Paru le 28/01/2025

(5 notes)
JUSTE LA FIN DU MONDE
THÉÂTRE DE L'ATELIER
Jusqu'au samedi 22 mars

COMÉDIE DRAMATIQUE. Après de longues années d’absence, Louis rend visite à sa famille avec le fardeau d’une terrible nouvelle. Mais comment exprimer l’indicible aux siens ? Juste la fin du monde dépeint par la force de mots et de silences éloquents, la complexité des liens familiaux.

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