Spécial Avignon par Patrick Adler
Vieilles chansons maléfiques
Au Chien qui fume
Bienvenue à Vienne ! Vienne et ses "Konditoreien" (pâtisseries), Vienne la Baroque, Vienne et ses peintres : Klimt, Schiele, Kokoschka..., Vienne et ses compositeurs : Mozart, Strauss, Haydn, Mahler mais aussi ses fantômes comme Adolf H., le petit moustachu et, curieusement, par une amnésie incompréhensible mais assumée par les Autrichiens, l'arrivée programmée d'un ancien nazi au pouvoir : Kurt Waldheim. Le décor est planté. Le huis clos de Jon Marens peut démarrer. Fascinant !
Sur l'air de "T'as voulu voir Vesoul, t'as vu...Honfleur", le jeune pianiste surdoué Stephen Hoffman, venu étudier avec le célèbre Professeur Schiller se voit contraint de passer par "le sas" Mashkan, un vieux professeur... de chant ! Autant dire que les relations sont d'emblée tendues. D'autant que, sans spolier la suite - la pièce fourmille de rebondissements -, chacun a un but bien défini à Vienne mais lequel ? On l'apprendra progressivement. A peine sorti de dépression, Stephen se montre rétif à toute épreuve, s'agace, s'emporte, la colère gronde. Face à lui, le vieux sage Mashkan joue de patience, maniant avec brio l'ironie, voire la provocation en s'immisçant dans l'intimité du jeune élève, l'interrogeant sur sa sexualité, sa religion, ses opinions politiques, n'hésitant pas à prêcher le faux pour connaître le vrai avec même quelques blagues douteuses sur les juifs.
Pourquoi cette confrontation sur fond de douceurs pâtissières du vieux Mashkan qui, dans ce jeu du chat et de la souris, prend tout son temps avant de croquer son élève... ou, peut-être, de se faire croquer par lui ? Jusqu'où peuvent-ils aller et surtout quel est leur but commun... à Vienne ? Les masques tombent peu à peu, l'atmosphère devient plus douce. Exit la fébrilité ou plutôt, si la fièvre est encore là, elle explose dans la (re)connaissance de chacun jusqu'à ce qu'on pourrait nommer "l'union sacrée". Ces deux fragilités sont mises peu à peu à nu, avec délicatesse, dans une progression dramatique qui sous-tend de bout en bout la pièce.
Le casting est juste formidable : Tom Novembre, dont le personnage très "Statue du Commandeur" se fissure, est aussi bouleversant que juste. Le charmant accent allemand qu'il prend donne du "Prussien" à son profil hiératique à la Bismarck. Tendre et drôle, subtil et cassant, fragile et désespéré, il est l'égal en plus âgé de ce jeune prodige (excellent Nicolas Verdier) qui, lui aussi, revient de loin, au point de ne plus avoir touché un clavier depuis deux ans. Nicolas Verdier joue la fougue, la colère à la perfection, manie le verbe avec insolence et magnifie l'empathie et la tendresse. D'autant que l'Histoire, la Grande, celle avec un Grand H, les relie dans la pièce. Mais nous ne saurions la spolier, juste dire que ce "Vieilles chansons maléfiques" est passionnant, dirigé de main de maître par un Thomas Joussier qui signe là une mise en scène et une direction d'acteurs formidables, avec un éclairage - dans tous les sens du terme - des plus réussis. Courez les applaudir !
Pourquoi cette confrontation sur fond de douceurs pâtissières du vieux Mashkan qui, dans ce jeu du chat et de la souris, prend tout son temps avant de croquer son élève... ou, peut-être, de se faire croquer par lui ? Jusqu'où peuvent-ils aller et surtout quel est leur but commun... à Vienne ? Les masques tombent peu à peu, l'atmosphère devient plus douce. Exit la fébrilité ou plutôt, si la fièvre est encore là, elle explose dans la (re)connaissance de chacun jusqu'à ce qu'on pourrait nommer "l'union sacrée". Ces deux fragilités sont mises peu à peu à nu, avec délicatesse, dans une progression dramatique qui sous-tend de bout en bout la pièce.
Le casting est juste formidable : Tom Novembre, dont le personnage très "Statue du Commandeur" se fissure, est aussi bouleversant que juste. Le charmant accent allemand qu'il prend donne du "Prussien" à son profil hiératique à la Bismarck. Tendre et drôle, subtil et cassant, fragile et désespéré, il est l'égal en plus âgé de ce jeune prodige (excellent Nicolas Verdier) qui, lui aussi, revient de loin, au point de ne plus avoir touché un clavier depuis deux ans. Nicolas Verdier joue la fougue, la colère à la perfection, manie le verbe avec insolence et magnifie l'empathie et la tendresse. D'autant que l'Histoire, la Grande, celle avec un Grand H, les relie dans la pièce. Mais nous ne saurions la spolier, juste dire que ce "Vieilles chansons maléfiques" est passionnant, dirigé de main de maître par un Thomas Joussier qui signe là une mise en scène et une direction d'acteurs formidables, avec un éclairage - dans tous les sens du terme - des plus réussis. Courez les applaudir !
Paru le 15/07/2025





